mardi 25 décembre 2012

Petite réaction suite à une interview de Noël

Ce matin interview par France culture pour les journaux de demain matin : c'est inouï de voir a quel point les journalistes qui me demandent quelles sont les répercussions des condamnations de l'état à raison des conditions de détention oublient que le premier effet est la restauration de la dignité des personnes détenues qui obtiennent une telle condamnation restauration de leur image face a la pénitentiaire revanche sur une administration a laquelle elles sont soumises H24 ça, c'est la première conséquence avant tout ! Et c'est la l'essentiel : les personnes détenues exercent leur propre contrôle et présentent la facture a l'état !

lundi 24 décembre 2012

Le Mouv' ce matin : Gilles Vervisch, philosophe; humanité/inhumanité ?


L'inhumanité procède de l'Homme, elle fait partie de sa nature "c'est très humain, d'être inhumain..."dit Gilles Vervisch. L'idéal de l'Homme, c'est de tendre vers l'humanité...rude tâche !

http://www.lemouv.fr/diffusion-facon-de-penser-167

vendredi 14 décembre 2012

Hier soir sur France 2 "Envoyé Spécial" ...



Alors que le contrôleur général des lieux de privation de libertés alerte les pouvoirs publics de la situation intolérable de la maison d’arrêt des Baumettes à Marseille, une équipe d’Envoyé Spécial a enquêté sur la révolte silencieuse menée par les détenus.
Depuis plusieurs années leurs avocats gagnent leurs combats devant les tribunaux. L’Etat français a été condamné à indemniser près de 300 détenus pour non respect de la dignité humaine. Le mouvement a commencé à Rouen et s’étend en Métropole mais aussi Outre-Mer. Une dizaine d’établissements ont déjà fait l’objet de condamnations. Comment ces prisonniers et leurs avocats ont-ils obtenu gain de cause ? Que disent-ils de leurs conditions de détention : insalubrité des cellules, violence liée à la surpopulation carcérale ? A Rouen mais aussi à Nouméa nos reporters ont pu recueillir des témoignages et des photographies exclusives de l’intérieur de cette prison qualifiée par certains magistrats et avocats de « bagne post-colonial ».

http://envoye-special.france2.fr/les-reportages-en-video/mutinerie-silencieuse-en-prison-13-decembre-2012-4706.html

Dernier jour d'un condamné...par Florence AUBENAS



Condamné en 1975 pour un braquage puis auteur de plusieurs évasions, Philippe El Shennawy a passé trente-sept ans en prison. Mercredi 12 décembre, le tribunal de Versailles a estimé qu'il devait purger encore trois ans. Dans la nuit, il a tenté, en vain, de se donner la mort
Neuf heures du matin, c'est l'heure où les décisions de justice commencent à tomber dans les greffes des prisons. Philippe El Shennawy a attendu ce moment toute la nuit dans sa cellule, à la maison centrale de Poissy (Yvelines). Il connaît par coeur la manière dont les choses se passent en détention : cela fait trente-sept ans qu'il y vit. Il déteste en parler. Il ne veut raconter que des choses du dehors. Mozart. La Callas. Les ordinateurs, sa passion. Un gin tonic à la terrasse d'un café. Il a mis toutes ses forces dans une procédure compliquée qui va lui permettre - espère-t-il - de sortir bientôt en liberté conditionnelle. Il n'a jamais tué personne. Il a 58 ans. Il pense tenir sa dernière chance d'une vie en liberté. Il a déjà annoncé qu'il se tuerait si ces démarches n'aboutissaient pas, ou duraient trop longtemps. Tout le monde le sait, son avocate, les juges, l'administration pénitentiaire, la presse, la chancellerie. Ce mercredi 12 décembre 2012, le prisonnier va au greffe chercher sa décision, d'un pas posé, habillé avec élégance. El Shennawy redoute par-dessus tout la pitié.
Ce jour-là, il lui est impossible de ne pas penser à Taleb Hadjadj. A vrai dire, El Shennawy y pense presque chaque jour. Ils ont été arrêtés ensemble pour " l'affaire de la rue de Breteuil ", en 1975, 6 millions de francs raflés à une banque avec prise d'otage, une des premières en France. Le fameux commissaire Broussard, qui vient de créer la brigade de répression du banditisme, y voit l'occasion de sa première action d'éclat. Il n'y a pas de victime, heureusement, mais la course-poursuite vire au grotesque pour les policiers : les voleurs se volatilisent avec les millions, toujours pas retrouvés à ce jour. Devant la cour d'Assises de Paris, en 1977, El Shennawy et Hadjadj comparaissent côte à côte, inséparables, beaux, drôles, avec leurs lunettes de soleil. Ils font des coups, dont ils parlent joyeusement, le cambriolage en maillot de bain d'un bureau de poste à Bandol (Var), par exemple, l'argent caché dans leur serviette éponge. Ils ont 20 ans.
Pour la rue de Breteuil, ils vont être acquittés, ils en sont sûrs : El Shennawy a un alibi, il était au consulat d'Egypte ce jour-là. Ils prennent perpétuité. Le commissaire Broussard, qui ne tient pas à voir l'affaire lui échapper une seconde fois, les a accablés dans sa déposition.
Etiquetés " détenus particulièrement surveillés ", El Shennawy et Hadjadj sont trimballés de prison en prison, parfois plus de six fois par an " pour des raisons de sécurité ". C'est toujours la même scène, une escouade de surveillants leur saute dessus par surprise, les capture comme des animaux pour les amener en fourgon à l'autre bout de la France. Ils apprennent à marcher en public les fers au pied. Dans ces moments-là, El Shennawy ne pense qu'à une chose : continuer à regarder les autres dans les yeux.
Ils sont seuls en cellule, avec le droit de rien, ni travail ni vie collective. Ils refusent les fouilles intégrales, pour laquelle la France est aujourd'hui régulièrement condamnée devant les tribunaux. La plupart de leur temps se passe au cachot disciplinaire. Ils lisent Balzac et Kant. Ne portent que du parfum Hermès, parce que c'est le dieu des voleurs. Le philosophe Michel Foucault, très engagé dans la cause des prisons, correspond avec eux.
En vérité, Taleb Hadjadj supporte mal la détention. Au bout de cinq ans, en 1980, il se suicide au quartier disciplinaire de Saint-Maur. " Tout a eu lieu dans le silence d'une nuit ordinaire, raconte un de ses voisins de cellule. Comme les passages à tabac, la mort de Taleb s'est inscrite dans la routine. Chaque surveillant faisait son boulot, je pense qu'on n'essaya même pas de le ranimer. " Au petit matin, le même voisin entend " le bruit plaintif du chariot utilisé habituellement pour servir la soupe. On y mit le corps de Taleb. Plus tard, ce qui se trouvait dans sa cellule fut placé devant sa porte, sur une serpillière ".
Certains surveillants aiment railler El Shennawy sur la mort d'Hadjadj. " On va te mettre dans la cellule où ton copain est mort. Ça te donnera des idées ", lui annonce un gardien, pendant un transfert à Saint-Maur (Indre). La différence entre les deux inséparables, c'est que El Shennawy veut vivre. C'est même ce qui le caractérise.
Trente ans plus tard, en cet automne 2012, il est debout au parloir de Poissy, ravi parce qu'une infirmière vient de lui dire qu'il ne paraissait pas son âge. C'est un jour d'euphorie, il y a même un rayon de soleil. Il se dit que sa " procédure de la dernière chance " va aboutir. " Je vais sortir. Je n'ai jamais perdu l'espoir, c'est ce qui m'a fait tenir. " Il parle du livre qu'il écrira, dehors, sur Taleb, " pour qu'il ne soit pas mort pour rien ". Dans le parloir à côté, un couple fait l'amour avec tapage. Un gardien arrive. Le détenu l'engueule. " Tu viens voir le cul de ma femme ? " El Shennawy continue comme s'il était dans le bar d'un grand hôtel : " Pendant tout ce temps, je ne me suis jamais senti détenu. "
En fait, El Shennawy a quelque fois connu la liberté durant ces trente-sept ans : près de quarante mois, morcelés en de lointaines occasions, toujours manquées. Il y a cette liberté conditionnelle balayée pour un week-end à Paris en 1991, alors qu'il y était interdit de séjour. Ou la permission de deux jours, dont il ne rentre pas, en 2002. Il est déjà à plus de vingt-cinq ans de détention. Quand il est rattrapé, il ne donne pas de raison. A qui expliquer qu'il n'arrive plus, physiquement, à retourner en prison ? Il y a aussi, en 2004, l'évasion de l'hôpital psychiatrique de Montfavet (Vaucluse), où il a été placé pendant une de ses grèves de la faim pour un ordinateur confisqué. Là-bas, comme il refuse de manger, on l'attache sur un lit. On le nourrit par une sonde de médicaments et de bouillie. Ça dure des jours et des semaines. Il finit par accepter une assiette, avec ce sentiment d'avoir plié, pour la première fois. Il prend trente kilos. Ne se lève plus. Quand il s'évade, un infirmier le voit se " traîner dehors comme un animal à bout ". Pas question pour lui de se présenter dans cet état devant Martine, la femme de sa vie. Sa cavale se passe en heures de sport, désintoxication, un ou deux braquages à quelques milliers d'euros pour vivre. Redevenir lui-même l'obsède. Le jour de la Saint-Valentin, il débarque chez Martine avec des fleurs. C'est là qu'il est arrêté. Dans le langage de l'administration pénitentiaire, tout cela s'appelle " gâcher ses chances ". Pour Montfavet, il est condamné à une période de sûreté de seize ans, c'est-à-dire sans libération possible avant 2018. Ces sanctions-là portent un nom, les peines d'élimination.
Cet été, El Shennawy a décidé de se laisser mourir de faim. Le directeur de Poissy, très investi, s'inquiète. Il commence par lui enlever son étiquette de " détenu particulièrement surveillé ", qu'il trimballait depuis l'affaire de la rue de Breteuil, puis pousse sa candidature pour un boulot dont il rêve, dans l'informatique. Une requête en relèvement de sa période de sûreté est entamée en urgence : la fameuse démarche de la dernière chance. D'autres détenus l'ont décrochée. Nouvelle garde des sceaux, Christiane Taubira multiplie les déclarations contre le tout-carcéral. Les voyants semblent au vert. El Shennawy arrête sa grève de la faim.
L'expert psychiatre ne le trouve ni dangereux ni fou, plutôt d'une intelligence supérieure, peut-être énervant dans sa manière de " toiser les autres du regard ", qui exaspère la plupart des surveillants. Son rapport conclut qu'aucun " suivi médical n'est nécessaire en cas de sortie " et ces derniers mots résonnent comme le bruit des clés aux oreilles d'El Shennawy. L'association Ban public lui a promis un emploi - dans l'informatique -, critère décisif pour une conditionnelle.
Désormais, son avocate recommande le silence : la médiatisation incommode les juges, les met sous pression. Même à El Shennawy, on conseille d'arrêter de répéter partout qu'il se tuera si l'attente excède une année. " On va croire que vous faites du chantage ", lui dit un cadre de la pénitentiaire à Poissy. El Shennawy proteste : mais il faut toujours dire ce qu'on pense, non ? Et le cadre, éberlué, regarde soudain le prisonnier : " Vous êtes vraiment fleur bleue, vous. "
En novembre, l'audience se passe sans heurt. Avec Martine, ils parlent interminablement du résultat, attendu le 12 décembre. Quel sens cela aurait-il de le maintenir en détention quelques années de plus alors qu'il a fait trente-sept ans ? El Shennawy a déjà plusieurs baccalauréats, deux CAP, une maîtrise d'histoire sur le haut Moyen-Age. A presque 60 ans, on l'a à nouveau inscrit, en pâtisserie cette fois. Pas tellement pour son CV à lui, plutôt celui de la pénitentiaire. Comme il réussit tous les diplômes, il fait grimper les statistiques.
Ces derniers jours, El Shennawy ne quittait plus sa cellule. Il avait commencé à distribuer ses habits, répétant qu'il n'en aurait plus besoin, quoi qu'il arrive. La veille, du jugement, il s'était coupé les cheveux, seul devant sa glace.
Il doit être plus de 9 heures, le 12 décembre, au greffe de Poissy, quand un surveillant explique à El Shennawy que la décision n'est pas encore arrivée. Son avocate est en déplacement. Il revient au greffe en fin de matinée. Puis à nouveau en début d'après-midi. Un gardien, qui l'aime bien, finit par lui glisser : " Ils te laissent encore trois ans dedans. " Quand El Shennawy reçoit la notification, il dit : " Je signe mon arrêt de mort. "
Sur son compte de prisonnier, il reste 3 euros. Il achète du crédit-téléphone pour dire adieu à Martine. " Il n'y a qu'une seule manière de donner un sens à tout cela. Ceux qui m'aiment comprendront. " El Shennawy a pris une douche très très chaude. Dans sa cellule, il a mis Mozart, s'est récité à nouveau la lettre laissée par Taleb trente ans plus tôt :" Il me reste entre quatorze et dix-huit ans à faire. Toutes ces années à vivre quand au bout de cinq ans je n'en peux plus. Je n'ai pas assez de courage ou de lâcheté pour résister. " Il est bientôt 23 heures Au petit jour, il est évacué en ambulance.
Florence Aubenas
© Le Monde

L'Observatoire international des prisons demande que le cahier des charges des nouvelles centrales construites avec un partenariat "public-privé" soit "entièrement revu".




Riom (Puy-de-Dôme), Valence (Drôme) et Beauvais (Oise) : trois villes qui doivent accueillir, en 2015, un nouvel établissement pénitentiaire flambant neuf.
Ils remplaceront sept établissements vétustes : deux à Riom et un à Clermont-Ferrand, Valence, Beauvais, Compiègne et Liancourt (Oise). Pour pouvoir les fermer au plus vite, le ministère de la Justice explique jeudi 13 décembre s'être résolu à conserver, pour ces trois nouvelles prisons, le mode de financement du "partenariat public-privé" (PPP).
Prévu par la précédente majorité, il permet à l'Etat de recourir à l'investissement privé en contrepartie d'un loyer. Jugé trop coûteux, il a fait l'objet de vives critiques de la part de... la ministre de la Justice elle-même. Christiane Taubira estimait en effet en juin qu'il n'était "pas acceptable" car il "engageait l'Etat sur au moins deux générations pour échapper à des crédits aujourd'hui". 
"C'est absurde et extrêmement décevant" réagit l'avocat et secrétaire national de l'OIP (Observatoire international des prisons) Etienne Noël. "On pare au plus urgent avec des solutions de bricolage qui vont alourdir l'endettement de l'Etat sur des dizaines d'années."
Un caractère d'urgence effectivement mis en avant par le ministère de la Justice pour justifier sa décision. La recherche d'une maîtrise d'ouvrage publique aurait pris trop de temps. Le ministère précise toutefois que le partenariat public-privé a également été conservé "pour des raisons sanitaires et de dignité." Une décision qui laisse plus que sceptique Barbara Liaras, en charge de la revue "Dedans Dehors" pour l'OIP, qui s'est particulièrement penchée sur les "nouvelles prisons". Dont une partie de la gestion est dans la grande majorité déléguée au privé.

"Plus les prisons sont grandes, plus le niveau de violence est élevé"

"Nous ne sommes pas vraiment surpris par cette annonce, car nous savions dès juillet que le partenariat public-privé était maintenu" note Barbara Liaras. Mais si elle "peut comprendre" que l'Etat "soit soumis à des engagements financiers", elle souhaite que "soit entièrement revu le cahier des charges" de ces nouveaux établissements.
"Le cahier des charges de ces établissements est établi par l'administration pénitentiaire, qui transmet aux prestataires privés ce qu'elle souhaite mettre en oeuvre". Elle dénonce d'abord la taille des établissements. Selon le journal "La Croix", celui de Riom pourrait recevoir 554 détenus, Valence 456, et Beauvais 594.
"Plus les prisons sont grandes, plus le niveau de violence est élevé et compliqué à contenir." L'architecture, explique-t-elle, conduit également à appliquer à tous des mesures de sécurité maximales, "quand seule une partie des détenus en a besoin, si tant est qu'elle en ait réellement besoin."
Des mesures qui se traduisent par un renfort de miradors, barbelés et caillebotis aux fenêtres, c'est-à-dire des grillages en plus des barreaux. Qui "réduisent considérablement la visibilité." Barbara Liaras ajoute que les nouvelles prisons sont conçues pour limiter au maximum les relations entre détenus, entre surveillants, et entre détenus et surveillants. "Tous les mouvements sont segmentés par des grilles, des sas... Sans compter la multiplication du recours au système électrique de surveillance, d'ouverture des portes,..."
Celle qui s'est entretenue avec des détenus et du personnel d'établissements récents rapporte un constat similaire des deux côtés : "les détenus se sentent plus seuls, les surveillants aussi. Ils dialoguent moins, se connaissent moins. D'où des tensions plus fortes." En gestion publique, poursuit-elle, un surveillant peut lui-même changer une ampoule grillée. "Pas en privé, où il doit transmettre une demande. Si elle n'aboutit pas rapidement, le surveillant ne peut que répéter au détenu qu'il a transmis sa demande."
Parmi les critiques les plus récurrentes sur les établissements financés en partenariat public-privé figurent en bonne place les prix des produits de la "cantine". "Dans le public, un vrai effort a été fait sur les tarifs, permettant de proposer aux détenus des prix tout à fait honnêtes" rappelle Barbara Liaras. En comparant les prix entre public et privé, elle a constaté des écarts très importants : "200 grammes de Chicorée coûtent 33 centimes dans le public, et peuvent monter jusqu'à 2,88 euros dans le privé."

"Proposer à chacun un suivi individualisé"

L'OIP souhaite que la ministre "mette en œuvre sa politique pénale" dont il ne "voit pas les effets pour l'instant", et qu'elle développe des peines non carcérales, de probation, comme les mesures de suivi, l'accompagnement en milieu ouvert,... "Il ne s'agit pas d'être laxiste, mais de proposer à chacun un suivi individualisé, adapté en fonction du délit et de ses besoins." Ce qui réduira "le flux et le nombre de personnes détenues". Alors pourra-t-on "commencer à réfléchir au temps de détention" et se poser la question suivante : "que faire pour que cette personne sorte de la délinquance ?"
Par  Le Nouvel Obs.fr

lundi 3 décembre 2012

Verdict accablant pour la prison des Baumettes



Marseille . Pour le Contrôleur des lieux de privation de liberté, l’établissement viole les droits de l’homme.
C’est une procédure exceptionnelle que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) n’avait jusque-là utilisée qu’une fois. Jeudi, pour la deuxième fois, il publiera au Journal officiel des«recommandations en urgence» concernant les Baumettes de Marseille, en raison d’une «violation grave des droits fondamentaux», de traitements inhumains et dégradants. Installé depuis septembre 2008, le Contrôleur général visite en moyenne 150 lieux par an (prisons, locaux de garde à vue et de rétention, geôles, dépôts, établissements de santé, centres éducatifs fermés).
Urgence. Les visites, inopinées dans les trois quarts des cas, durent en moyenne quatre à cinq jours et mobilisent généralement trois à cinq personnes. A l’issue, Jean-Marie Delarue, Contrôleur général pour six ans, fait connaître ses observations aux ministres concernés. Ils répondent, puis un rapport est rédigé, quelques mois après la visite. Il existe aussi une procédure d’urgence, lorsque des atteintes graves aux droits fondamentaux sont constatées. Le Contrôleur signale alors rapidement ses observations aux ministres en leur fixant un délai rapproché pour répondre.
S’il constate qu’il n’a pas été mis fin aux violations constatées (aux Baumettes ce serait difficile en si peu de temps), il publie ses recommandations en urgence au Journal officiel. Il avait utilisé cette procédure pour la première fois l’an passé, pour une prison de Nouméa. La situation sur place, constatait-il, «dépasse l’entendement». Un an plus tard, vingt membres des équipes de Jean-Marie Delarue ont passé deux semaines aux Baumettes, du 8 au 19 octobre 2012. Un investissement exceptionnel, pour une prison qui passe pour être l’une des plus dégradées de France.
Délai. Parmi les institutions qui ont déjà alerté sur son état, le Comité européen pour la prévention de la torture et le commissaire européen aux droits de l’homme, qui parlait en 2005 d’un «endroit répugnant» (lireLibération du 22 septembre 2005). Cela n’a pas beaucoup changé depuis et après l’inspection du mois dernier, le Contrôleur général a communiqué à Christiane Taubira, garde des Sceaux, et Marisol Touraine, ministre de la Santé, ses recommandations. Elles avaient trois semaines pour lui répondre. Le délai s’achève demain. Jeudi, Jean-Marie Delarue publiera ses recommandations, et tiendra une conférence de presse pour les rendre publiques.

vendredi 16 novembre 2012

Maison d'arrêt de Tours : Des détenus se plaignent des conditions de détention



La voie est tracée! J'ai obtenu en 2012 la condamnation de l'Etat à raison des conditions de détention dans cette maison d'arrêt. Il est vrai qu'il s'agissait d'une personne âgée mais l'expertise qui avait été faite en 2011 est suffisamment large et probante pour envisager des recours en faveur d'autres personnes détenues.

http://www.lanouvellerepublique.fr/Indre-et-Loire/Actualite/Faits-divers-justice/n/Contenus/Articles/2012/10/25/Des-detenus-se-plaignent-des-conditions-de-detention

Tours. Plusieurs détenus de la maison d’arrêt viennent adresser un courrier à l’administration pour se plaindre de la vie carcérale.

Le courrier est adressé à la Direction régionale de Dijon de l'administration pénitentiaire. Et il porte mention de plus d'une trentaine de signatures. La copie de cette lettre a également été envoyée à la rédaction de La Nouvelle République. Comment ces courriers sont-ils sortis de la maison d'arrêt ? On l'ignore.
" Un accès régulier à la bibliothèque "
Mais le contenu fait état de revendications, clairement exprimées par ses auteurs, et rédigées à l'aide d'une écriture soignée.
« Nous demandons une amélioration de la vie carcérale au sein de cet établissement », expliquent les détenus. La lettre détaille ensuite leurs revendications précises à commencer par le droit à travailler « en priorité pour les détenus indigents n'ayant pas de revenus pour subvenir aux besoins ni pour indemniser les parties civiles »« Nous demandons également que la liste d'attente pour les demandeurs de travail soit respectée », ajoute l'auteur du courrier. Des activités socioculturelles et sportives sont aussi réclamées.
Plus surprenant encore, ceux qui ont signé ce courrier évoquent « des risques d'incendie » au sein de l'établissement en raison des « chauffes artisanales » utilisées par certains pour cuire leurs aliments en cellule.
Parmi les autres revendications des signataires, on notera aussi « un accès facilité au téléphone pour les détenus autorisés à téléphoner » ou encore « le respect du protocole d'hygiène en cuisine et lors de la distribution des repas » ou bien encore « un accès régulier à la bibliothèque ».
Une partie importante de cette lettre est aussi consacrée aux relations des détenus avec leurs proches. Ils réclament, par exemple, « une amélioration du service des parloirs », en insistant sur le problème des retards. Des transferts pour rapprochement familial sont aussi demandés.
Un courrier étonnant, donc, auquel l'administration pénitentiaire n'a, pour l'instant, pas apporté de réponse.

Les chiffres de la pouplation carcérale au 1er octobre 2012


Hausse de 0,9% sur un mois du nombre de détenus, à 66.704 début octobre

PARIS, 14 nov 2012 (AFP) - 

Le nombre de détenus dans les prisons françaises
était au 1er octobre de 66.704, en hausse de 0,9% par rapport au 1er
septembre, selon des statistiques mises en ligne cette semaine par le
ministère de la Justice.
Les chiffres au 1er novembre n'étaient pas encore disponibles mercredi.
Les statistiques pénitentiaires mensuelles sont habituellement diffusées
dans le courant du mois concerné, mais n'ont été rendues publiques que
tardivement pour octobre, ce qui avait amené la semaine dernière un directeur
de recherche au CNRS, spécialiste de la démographie pénale, à s'en étonner.
"Il y a trois façons de résoudre le problème de la surpopulation des
prisons: augmenter le nombre de places, diminuer le nombre des détenus ou
supprimer la statistique", avait ironisé devant les députés ce chercheur,
Pierre-Victor Tournier.
Les statistiques au 1er octobre ont finalement été mises en ligne mardi sur
le site du ministère (www.justice.gouv.fr).
Selon ces chiffres, 66.704 personnes étaient alors détenues, contre 66.126
au 1er septembre (+0,9%), alors que le nombre de détenus avait diminué de 0,9%
au cours de chacun des deux mois précédents.
Sur un an, la hausse est de 4% (64.147 détenus au 1er octobre 2011). Un
record historique avait été atteint au 1er juillet 2012, avec 67.373
prisonniers.
Le parc pénitentiaire comptant au 1er octobre 56.991 places, le taux
d'occupation moyen est de 117%, selon un calcul de l'AFP.
Le tableau statistique précise que sur un total de 246 "établissements ou
quartiers", 12 ont une "densité" supérieure ou égale à 200%, 31 entre 150 et
200%, 49 entre 120 et 150% et 36 entre 100 et 120%. L'occupation est
inférieure à 100% dans 118 établissements ou quartiers pénitentiaires.
Sur son blog, Pierre-Victor Tournier note que "657 détenus dormaient sur un
matelas posé à même le sol" à la date du 22 octobre.
La ministre de la Justice, Christiane Taubira, a adressé mi-septembre une
circulaire aux parquets contenant plusieurs recommandations destinées à rompre
avec le "tout-carcéral". Elle préconise notamment de faire de l'aménagement
des peines d'emprisonnement (semi-liberté, bracelet électronique, etc.) "une
priorité de politique pénale".

Casanova Agamemnon : "La justice m’a déporté et oublié"




Casanova Agamemnon (à droite) à la prison du Val de Reuil lors d’une visite de son ami Jean-Charles Najède : "Je suis toujours en relation avec ma famille et mes amis à la Réunion. Heureusement qu’ils sont là et, croyez-moi, ils ont beaucoup de mérite après tout de rester à mes côtés pour me soutenir moralement" (photo DR)
Pour la première fois depuis son procès en 1988, Casanova Agamemnon s’exprime publiquement. Incarcéré en métropole, le Bénédictin, qui a passé 43 ans derrière les barreaux, a accepté de répondre à notre interview. Celui qui reste l’un des détenus les plus célèbres de la Réunion dénonce le sort que lui a réservé la justice : "l’oubli et la déportation". Il dit garder une "force intérieure" et l’espoir de retrouver son île natale grâce aux efforts de son avocat, Me Etienne Noël.

INTERVIEW
Monsieur Agamemnon, quel homme êtes-vous aujour-d’hui après avoir passé autant d’années en prison ?
Je suis toujours le même homme que j’ai été avec mes défauts et mes qualités. Toujours respectueux des autres afin d’être respecté. C’est la base même de mon éducation et de mes principes.
Vous êtes incarcéré depuis 1969, mise à part votre libération conditionnelle entre juillet 1985 et mai 1986. Considérez-vous que vous avez été oublié en prison par la justice ?
Oui, je considère que la justice m’a oublié mais c’est un oubli bien planifié par le système avec la volonté de me détruire par un soi-disant transfert provisoire mais transformé par une déportation de 1988 sur Fresnes.
Vous faites partie des plus vieux prisonniers de France. Estimez-vous qu’à notre époque la justice puisse encore laisser enfermées des personnes pendant aussi longtemps ?
La justice française est capable de tout. J’en suis une preuve bien vivante. Il n’y a pas besoin d’aller en Russie ni en Chine, comme on nous fait croire, pour trouver ce genre de justice. La France est le pays des droits de l’Homme, peut-être bien pour l’homme blanc ! Chaque année, elle est condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme pour ses abus excessifs, pour son non-respect aux droits des personnes incarcérées ou autres… Comme je n’ai pas l’habitude de fermer ma gueule, je vous dirai que je suis victime d’une justice parallèle et discriminatoire.
Vous souhaitez sortir de prison et revenir à la Réunion. Mais, ici, certaines personnes disent avoir encore peur de vous et vous voient toujours comme l’ennemi public n° 1 en cavale. Que leur répondez-vous ?
Concernant la soi-disant "peur de moi", comme vous dites, je n’y crois pas trop. J’espère tout simplement que le système ne cherche pas aujourd’hui à justifier ses conneries en faisant porter la responsabilité de cette déportation sur les Réunionnais et les Réunionnaises. Car lors de ma cavale, en 1986, je n’ai agressé personne dans mon tour de l’île. Afin de justifier tous mes rejets de transfert depuis 1989, le système a utilisé comme base la médiatisation de l’affaire. Mais tout ça n’explique pas pourquoi, sur une condamnation de 10 ans, je suis toujours au fond d’une cellule vingt-sept ans après, sinon pour assouvir une petite vengeance perso de la part d’un de leur confrère…
Juste pour vous dire que ce n’est plus une justice républicaine qui est appliquée à mon égard mais une justice de voyou. Je suis entré dans le temps d’une libération conditionnelle depuis le mois de mai 1991. J’ai eu sur la Réunion trois employeurs possibles de 1991 à 2007 ainsi que des certificats d’hébergement. Donc dossier complet et chaque année, rejet… Sauf que cette année, pour la première fois, je présente un dossier sans certificat d’emploi, à moins que d’ici là, avant la commission, mes amis me trouvent quelque chose. J’attends. Sinon, ils trouveront là encore un prétexte pour un nouveau refus.
J’affirme que je suis devenu l’instrument d’un complot de l’administration pénitentiaire depuis 1986, simplifié par une accusation non fondée, sur des faux témoignages. A priori, ça a bien fonctionné au niveau du ministère de la Justice. Jusqu’au mois de mai 2012…
Sur les quatre condamnés à perpétuité que j’ai connus depuis 1973, tous ont bénéficié d’une libération conditionnelle. Pas moi. Parmi eux, un condamné à 20 ans et qui est entré après moi. Sauf qu’eux étaient zoreils… Je ne suis pas parano mais il y a quelque chose qui cloche, n’est-ce pas ?
Etes-vous fréquemment en relation avec des personnes de la Réunion ?
Bien sûr que je suis toujours en relation avec ma famille et mes amis à la Réunion. Heureusement qu’ils sont là et, croyez-moi, ils ont beaucoup de mérite après tout de rester à mes côtés pour me soutenir moralement. J’ai de temps en temps une petite visite de mon ami Jean-Charles pour parler du pays. C’est toujours très agréable. Il y a aussi des personnes qui pensent encore à moi. Pour d’autres, malheureusement, je n’aurais aucune chance de les revoir vivantes avant mon retour, sauf dans un cimetière. Mais pour la justice française, ça n’a aucune importance.
Votre avocat dit être étonné par le fait que vous gardez un moral extraordinaire ? Ne vous arrive-t-il pas d’être déprimé par votre situation ?
Avec ma situation pénale, il y a de quoi parfois être déprimé. Je ne suis qu’un homme avec mes faiblesses, mais aussi avec une force intérieure qui m’oblige à la survie malgré les injustices que j’ai subies, et je subis malheureusement encore aujourd’hui toutes les mesquineries de la part des surveillants, les humiliations, le mépris et la discrimination. Il y a de quoi devenir fou. Mais j’ai appris à vivre avec en faisant un travail sur moi-même. Ce n’est pas facile à obtenir. Ça demande beaucoup d’efforts, croyez-moi, en 43 ans de taule, surtout pendant les 35 ans sur la métropole, depuis 1973 avec les années de QSR (quartier de sécurité renforcée) et QHS (quartier de haute sécurité) comme Fresnes, Lisieux, Tulle, Mende et Bourgoin-Jallieu. Le moins pourri était encore celui de Fresnes. De 1975 à 1984, j’ai eu deux parloirs. Mais j’ai toujours refusé de prendre des médicaments pour dormir, comme les somnifères, les antidépresseurs. C’est le piège pour beaucoup autour de moi. Je vois les ravages produits par toute cette merde. La plupart ont moins de 25 ans et le cerveau déjà en bouillie. Lorsqu’ils se trouvent dans le couloir, ce sont de vrais zombies. Ils ne peuvent plus faire face. Le moindre petit pépin, ils craquent. Oui, je peux dire qu’aujourd’hui, la prison fabrique des camés. C’est bien la première fois que je tombe dans une prison où il y a autant de suicides.
Au cas où vous seriez transféré à la Réunion, ne craignez-vous pas de ne pas reconnaître votre île natale ?
C’est évident que beaucoup de choses auront changé à mon retour dans mon île en 43 ans. Mais, que voulez-vous, j’aime mon île avec la mentalité des gens qui y vivent. Il y a aussi sa grande diversité ethnique et religieuse qui est un exemple pour beaucoup de pays. Puis, il y a le climat, sans oublier les bons petits plats que je ne trouve pas ici.
Avez-vous encore espoir de rentrer à la Réunion ?
Concernant ma dangerosité avancée par l’administration pénitentiaire, je vous dirai que je ne suis pas plus dangereux que les personnes qui vous croisent sur votre chemin chaque jour, ni plus dangereux qu’une voiture et 100 fois moins qu’un engagé militaire, si vous vous voyez ce que je veux dire… Le Mahatma Gandhi a pu supporter toutes les humiliations qui lui ont été infligées par les Anglais dans les prisons. Il y a un choix à faire entre survie et le suicide
Interview : Jérôme Talpin

samedi 10 novembre 2012

Le vieux Corse et l'informatique



Un vieux Corse vit depuis plus de 50 ans dans la montagne.Il aimerait bien planter des pommes de terre dans son jardin, mais il est tout seul, vieux et faible.Il a la chance de participer à des séances d'initiation à l'informatique.Il envoie alors un courriel à son fils, qui est incarcéré à la Santé à Paris, pour lui faire part de son problème.

Cher Dumé,
 Je suis très triste car je ne peux pas planter des pommes de terre dans mon jardin.  Je suis sûr que si tu étais ici avec moi, tu aurais pu m'aider à retourner la terre. 
 Ton père qui t'aime. Pascal

 
Le lendemain, le vieil homme reçoit ce courriel :
 Cher Père,
S'il te plaît, ne touche surtout pas au jardin!  J'y ai caché ce que tu sais.
 Moi aussi, je t'aime.
 Ton fils Dumé.


À 4 heures du matin arrivent chez le vieillard :
 - la Brigade antiterroriste,
  
- le GIGN,
 - les RG,
 la DNAT, la Cellule de surveillance informatique
   
- la CIA et le FBI
 - et même TF1, France 2, France 3.
 Ils fouillent tout le jardin, millimètre par millimètre, et repartent bredouilles.

 
Quelques heures plus tard, le vieil homme reçoit un nouveau courriel de son fils :
 Cher Père,

  
Je suis certain que la terre de tout le jardin est désormais retournée et que tu peux planter tes pommes de terre.
Ton fils qui t'aime,
 Dumé

le guide méthodologique de prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice‏


Ce guide constitue une véritable mine d'informations à destination de tous ceux qui souhaitent, soit en savoir plus sur l'organisation des soins en détention, soit, agir lorsque la situation sanitaire d'une personne détenue et la prise en charge de ses pathologies semble défectueuse.

J'entends beaucoup trop souvent mettre en cause l'administration pénitentiaire à raison des problèmes de santé, souvent graves rencontrés par telle ou telle personne détenue. En réalité, la question de la santé en détention incombe, depuis une loi de janvier 1994, à l'administration de la santé; il n'y a plus de médecine pénitentiaire, c'est donc l'hôpital public qui intervient en détention, via les UCSA (Unités de Consultation et de Soins Ambulatoires). De même, c'est l'hôpital psychiatrique qui gère les Services Médico Psychologiques Régionaux (26 seulement en France) qui dispensent les soins psychologiques ou psychiatriques en prison.

Il y a beaucoup à dire et à faire, s'agissant de la qualité des soins en détention. Je suis en charge de nombre de situations qui démontrent, malgré les efforts déployés par les praticiens exerçant dans les UCSA, une véritable carence (par exemple, sur le question des soins dentaires).

http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2012/11/cir_36019.pdf


Le lien pour écouter l'émission du 5 novembre 2012 "envie d'Italie" à propos du film des frères Taviani "César doit mourir"

vendredi 2 novembre 2012

Quid de l'avenir de la maison centrale de Poissy ?



AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2013 (n° 235),
TOME VI
JUSTICE
ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
PAR M. Sébastien HUYGHE,
Député.


b) Quel avenir pour la maison centrale de Poissy ?

Votre rapporteur pour avis a souhaité, dans le cadre de la préparation du présent avis, visiter l’un de ces établissements dont la fermeture est remise en cause, et s’est donc rendu à la maison centrale de Poissy. Son objectif était d’évaluer, le plus objectivement possible et sans a priori sur la meilleure solution à retenir, les avantages et les inconvénients que présenterait soit une fermeture soit un maintien en service.
Votre rapporteur pour avis remercie chaleureusement le directeur de la maison centrale de Poissy et l’ensemble des personnels qu’il a pu rencontrer à l’occasion de cette visite, tant pour la qualité de leur accueil que pour les informations qui lui ont été communiquées, et salue leur dévouement à l’institution et leur investissement évidents.
Les maisons centrales sont des établissements pénitentiaires accueillant les personnes condamnées à des longues peines dont les perspectives de réinsertion apparaissent comme les moins favorables. Située au centre historique de la vieille ville, la maison centrale de Poissy est un ancien couvent fondé en 1645, en partie détruit à la Révolution et transformé en 1810 en dépôt de mendicité. En 1817, les bâtiments sont transformés en prison, puis convertis en maison centrale de correction en 1821. Presque complètement reconstruite sous le Second Empire, puis à nouveau en 1975, la maison centrale est désormais composée d’un bâtiment cellulaire construit sur quatre niveaux, les locaux administratifs étant situés dans une aile de l’ancien couvent tandis qu’une autre aile de cette partie historique est désaffectée depuis 1975. Aujourd’hui, la maison centrale de Poissy dispose d’une capacité opérationnelle de 235 places.
La maison centrale de Poissy faisait partie des établissements dont le précédent Gouvernement avait, en juillet 2010, annoncé la fermeture dans le cadre du programme « NPI », parallèlement à l’ouverture de trois établissements neufs en Ile-de-France. Comme pour les 35 autres sites dont la fermeture était programmée, cette décision avait été prise en prenant en compte les conditions de détention, notamment au regard des normes de la loi pénitentiaire, la difficulté à le rénover ou à le mettre aux normes du fait des contraintes financières ou de contre-indications techniques et sa situation géographique particulière.
Dans sa configuration actuelle, la maison centrale de Poissy présente indéniablement un certain nombre d’atouts, à commencer par sa situation en centre-ville et sa bonne desserte tant routière que ferroviaire, qui favorisent le maintien des liens familiaux (38). Elle paraît également fonctionner de façon globalement satisfaisante et apaisée, les personnels rencontrés par votre rapporteur pour avis n’ayant pas fait part de difficultés particulières en matière de conditions de travail et ayant souligné que l’établissement faisait partie des plus demandés par les personnels pénitentiaires en Ile-de-France.
Toutefois, cette maison centrale souffre également d’un certain nombre de handicaps tenant aux conditions de détention, à sa sécurité et aux activités accessibles aux détenus. Tout d’abord, sur le plan des conditions de détention, sa mauvaise isolation (fenêtres sans double vitrage, courants d’air et combles non isolés) la rendent particulièrement vulnérable aux grands froids (39) et coûteuse en énergie. En outre, la superficie de 7 m² des cellules les placent tout juste au-dessus du niveau indicatif souhaitable fixé par le Comité européen pour la prévention de la torture à 6 m² pour une cellule occupée par une personne seule. Cette faible superficie s’avère particulièrement problématique lorsque la personne détenue est une personne à mobilité réduite, se déplaçant en fauteuil roulant et dormant dans un lit médicalisé, comme cela est de plus en plus fréquemment le cas en raison du vieillissement de la population pénale.
En deuxième lieu, sur le plan de la sécurité de l’établissement, son implantation en centre-ville, la configuration de ses bâtiments et sa proximité des immeubles environnants le rendent aujourd’hui impropre à sa destination théorique de maison centrale à haut niveau de sécurité. De fait, selon le directeur de l’établissement, le profil des personnes qui y sont aujourd’hui écrouées s’apparente – à quelques exceptions près – davantage à la population d’un centre de détention pour longues peines plutôt qu’à celle des autres maisons centrales dites « sécuritaires ».
En troisième lieu, sur le plan des occupations accessibles aux détenus, les surfaces d’ateliers trop restreintes et l’impossibilité pour les camions semi-remorques d’accéder à l’établissement en raison de sa localisation en centre-ville nuisent à l’attractivité de l’établissement pour les entreprises. Au-delà du contexte actuel difficile pour l’emploi en général et pour l’emploi pénitentiaire en particulier, cette faible attractivité aboutit à ce que seuls 60 détenus puissent aujourd’hui travailler en ateliers (40), les détenus nouvellement affectés à la maison centrale devant attendre en moyenne un an avant de pouvoir travailler.
Ces différents éléments avaient conduit le précédent Gouvernement à considérer qu’un maintien en service en l’état de cette maison centrale n’était pas envisageable : un choix clair et rapide devait être fait entre une fermeture et une réhabilitation. Le coût d’une réhabilitation complète du site avait alors été évalué à 55 millions d’euros, sans accroissement de la capacité d’accueil, soit un coût à la place de 239 000 €. Toutefois, une telle réhabilitation n’aurait pas permis de gommer les défauts structurels de l’établissement, que sont le manque de surface disponible pour créer des zones d’ateliers attractives et la localisation en centre-ville qui rend impossible l’accès aux véhicules semi-remorques. Par comparaison, le coût moyen de construction à la place dans le cadre d’un établissement neuf a été évalué par la Cour des comptes à un montant allant de 108 300 € à 145 500 € selon la formule juridique retenue (41).
Au vu de ces éléments financiers, des inconvénients qu’aurait présentés une réhabilitation par rapport à une construction neuve et de la nécessité d’étendre et de moderniser le parc pénitentiaire français pour répondre aux besoins en matière d’exécution des peines, le précédent Gouvernement avait pris la décision de fermer la maison centrale de Poissy et de la remplacer par un établissement neuf, plus grand et totalement adapté aux standards pénitentiaires actuels.
Cependant, le nouveau Gouvernement a, dès son installation, gelé ce projet de construction d’une nouvelle maison centrale. Un nouveau projet de restructuration, consistant à transformer la maison centrale en centre de détention pour longues peines d’une capacité de 350 places auquel seraient accolés un centre de semi-liberté de 50 places et un centre pour peines aménagées de 30 places, a été préparé par la direction de l’établissement, et évalué à 19 millions d’euros. Un projet complémentaire de réalisation d’un centre de formation continue et de séminaires de l’administration pénitentiaire, dans des bâtiments adjacents au nouvel établissement, a également été élaboré et évalué à 12 millions d’euros.
Votre rapporteur pour avis a entendu le souhait exprimé par les représentants du personnel de l’établissement qu’il a rencontrés que le site de Poissy demeure un site pénitentiaire et le soutien apporté par ces personnels au projet présenté par la direction. Toutefois, il estime nécessaire d’attirer l’attention sur l’inconvénient majeur d’une nouvelle restructuration du site de Poissy : le fait que la surface disponible sera nécessairement limitée et le risque élevé que les zones d’activités (ateliers, espaces de formation et installations sportives) se révèlent trop limitées compte tenu de l’augmentation de capacité envisagée.
Surtout, il estime qu’il importe que le Gouvernement prenne rapidement une décision sur l’avenir de la maison centrale de Poissy, l’incertitude qu’il laisse planer sur l’avenir de ce site pouvant être source de démobilisation des personnels et ayant pour effet de maintenir en service un établissement qui ne saurait rester plus longtemps en l’état.

http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2013/a0258-tVI.asp

Voici le site officiel de la Conférence de consensus installée par Madame Taubira et présidée par Madame Nicole Maestracci Première Présidente de la Cour d'Appel de Rouen


Il est important de noter que cette conférence est présidée par une magistrate, ancienne Juge de l'Application des Peines, profondément imprégnée par cette idée que le meilleur instrument de lutte contre la récidive passe par la promotion et l'amélioration incessantes des procédures d'aménagement de peine, dans le sens de la réinsertion, plutôt que prôner l'enfermement ; le moment est il enfin arrivé d'une remise à plat des lois, à partir de celle du 12 décembre 2005 jusqu'à celle du 10 août 2011 qui a détricoté ce que la Loi Pénitentiaire du 24 novembre 2009 avait péniblement mis en place (confer l'article 730-2 du code de procédure pénale)?

Madame Nicole Maestracci a longuement insisté, dans le discours qu'elle a prononcé, le 30 octobre dernier, lors de la prestation de serment des jeunes avocats de la promotion 2012 du Barreau de Rouen, sur le nouveau rôle de l'Avocat en prison; une défense globale passant par les outils de l'application des peines et du Droit Pénitentiaire Administratif; cette Première Présidente est véritablement extraordinaire !

http://conference-consensus.justice.gouv.fr/

mercredi 31 octobre 2012

Prison de Fresnes : les petits frères des Pauvres accompagnent les détenus gravement malades et en fin de vie

http://www.senioractu.com/Prison-de-Fresnes-les-petits-freres-des-Pauvres-accompagnent-les-detenus-gravement-malades-et-en-fin-de-vie_a15388.html


Placé sous le parrainage de Robert Badinter, ancien Garde des Sceaux et ancien Président du Conseil Constitutionnel, ce 10ème anniversaire constitue l’occasion de présenter les actions menées par les petits frères des Pauvres auprès des personnes malades détenues au sein de l’Etablissement Public de Santé National de Fresnes.


« LE TAUX DE RÉCIDIVE EST DE 16 % À BASTOY, 66 % AUX ETATS-UNIS »

http://www.6mois.fr/Le-taux-de-recidive-est-de-16-a


Dans un fjord au large d’Oslo, la capitale norvégienne, une petite île a été transformée en centre de détention. Bastoy, première "prison écologiste et humaniste du monde", n’a ni enceintes ni barreaux. Intrigué par la vie de l’île-prison, Espen Eichhöfer raconte le quotidien des détenus.

Le portfolio « L’île aux prisonniers », publié dans le numéro 4, est une plongée dans la prison ouverte norvégienne de Bastoy. John Pratt, professeur de criminologie, décrypte cette exception carcérale


Dans un fjord au large d’Oslo, en Norvège, l’île de Bastoy a été transformée en prison ouverte, sans enceintes ni barreaux. Les 150 détenus vont et viennent sur le ferry qui les relie à la terre ferme, travaillent dans des étables, des poulaillers, des épiceries ou des serres, entourés de gardiens non armés. Professeur de criminologie à Wellington, en Nouvelle-Zélande, John Pratt s’est rendu de nombreuses fois dans les pays scandinaves pour étudier leur système carcéral et le comparer à celui des pays anglophones.

6Mois/ Dans les pays scandinaves, Bastoy est-elle une prison « normale » ?
John Pratt/ Bastoy est le joyau des prisons ouvertes. L’environnement pittoresque, le ferry, les chalets, la « guesthouse »… Tout cela en fait un endroit très photogénique et un exemple particulièrement médiatisé. Mais ce parangon est aussi typique des pays scandinaves, où les prisons ouvertes concernent 20 à 30 % de la population carcérale, un chiffre énorme !
Qu’est-ce qu’une prison ouverte ?
Les barreaux et les murs sont réduits à leur minimum, tout simplement. Le concept de « prison ouverte » a été créé en Finlande, dans les années 1930, quand des détenus ont été autorisés à travailler dans des fermes. Les détenus sont payés selon le salaire en vigueur, paient des impôts, achètent leur nourriture, envoient de l’argent à leur famille ou à leurs victimes et économisent pour leur libération. Cette rémunération a longtemps eu cours en Norvège et en Suède mais aujourd’hui, les détenus n’y reçoivent plus qu’une indemnité, comme dans la plupart des prisons européennes.
Dans certaines prisons ouvertes, les détenus peuvent continuer à exercer leur ancien emploi. Près de Stockholm, il y a même un parking spécial pour les prisonniers, pour qu’ils puissent aller travailler le matin et revenir le soir. S’ils sont en retard, ils peuvent téléphoner et on leur garde un repas au chaud.
Et a contrario, les prisons fermées scandinaves ressemblent-elles aux nôtres ?
À l’extérieur, une prison fermée scandinave ressemble à n’importe quelle prison. Mais on n’y trouve pas d’ « odeur de prison », ce mélange de mauvaise hygiène, de pots de chambre, de nourriture et de fumée de cigarette. La plupart des cellules ont leurs propres toilettes et beaucoup ont une télévision. Les prisonniers peuvent aller et venir mais personne ne semble traîner pour passer le temps. Beaucoup travaillent ou suivent des cours à distance. Il y a aussi des salles communes, avec télé et/ou cuisine. La nourriture m’a semblée généreuse, en tout cas personne n’est rationné en sucre, pain ou que sais-je encore, comme cela peut être le cas dans les prisons du monde anglophones.
Autre illustration de l’incroyable qualité des prisons scandinaves : des solariums sont mis à disposition dans de nombreuses prisons, ouvertes ou fermées. Ce n’est pas si exotique que l’on pourrait l’imaginer car dans ces pays, le manque de lumière en hiver peut causer de sérieuses carences en vitamine D. Mais tout de même ! Cela prouve que les autorités ne s’intéressent pas seulement à gérer les urgences ou les cas graves, mais tentent de prévenir les problèmes de santé chroniques.
La formation du personnel pénitentiaire est-elle spécifique ?
Le ratio est d’environ un membre de l’administration carcérale pour un détenu. En Norvège, tous ont des formations universitaires et bénéficient de deux années de formation payées. Cette formation ressemble à celle qui est fournie aux contrôleurs judiciaires, pour que tous aient les mêmes bases académiques, professionnelles et éthiques. Travailler en prison semble être une option non seulement envisageable, mais beaucoup plus attractive que dans toutes les autres sociétés modernes. Pour preuve : beaucoup d’étudiants scandinaves travaillent l’été en tant que gardiens de prison !
Dans vos recherches, vous parlez d’ « exception pénale scandinave » : qu’est-ce c’est ?
Un cercle vertueux : l’État providence omniprésent garantit un faible taux de criminalité. Les prisons ne sont pas bondées et assurent aux détenus des conditions de vie décentes. Celles-ci font baisser le taux de récidive et donc, en retour, le taux de criminalité. Rendez-vous compte ! Le taux de récidive est de 66 % aux Etats-Unis, 31 % en Finlande, 30% en Suède et 20 % en Norvège. À Bastoy, il est même de 16% !
Depuis quand la criminalité fait-elle l’objet de politiques publiques ?
Dans les années 1930, les pays scandinaves considèrent le crime comme une forme de maladie qui, grâce au diagnostic d’experts et à une politique d’accompagnement, peut être éradiqué comme n’importe quelle autre maladie contagieuse. En Suède, le Code pénal indique même depuis 1945 que les prisonniers sont « des orphelins de la maison du peuple suédois » (styvbarn i det svenska folkhemmet) et que le système se doit de les réintégrer.
Dans les années 1960, le ministère suédois de la justice prédit même avec optimisme qu’il n’y aurait plus que 600 prisonniers à travers le pays d’ici 1980 ! Les détenus ne sont pas considérés comme de dangereux outsiders mais comme un simple groupe de bénéficiaires de l’Etat providence.

Quels sont ses outils pour réduire la criminalité ?
La lutte contre la drogue et l’alcool, le renforcement des services de psychiatrie et une véritable politique de l’emploi sont particulièrement efficaces. En 2006, le parti travailliste norvégien déclarait qu’ « avec des services publics adaptés, le crime et la plupart de ses motivations peuvent être éliminés. »
La politique pénale est menée par des experts, indépendamment de tout opportunisme politicien. Tout le contraire de ce qui se passe dans les pays anglophones, où le comportement des hommes politiques et des médias face aux meurtriers frise l’hystérie : souvenez-vous que pendant les émeutes de Londres, à l’été 2011, des gamins ont été envoyés en prison parce qu’ils avaient volé des bouteilles d’eau !

Est-ce que cela coûte cher ?
Le coût humain et social est bien plus important lorsque le système pénal est inefficace et les prisons bondées ! Il est bien plus rentable d’investir en amont dans l’éducation et la santé. Plus les gens sont éduqués, plus ils sont capables d’avoir un emploi et de gagner de l’argent, moins ils seront sensibles aux sirènes du crime. Une chose m’a frappé dans les prisons norvégiennes : tout le monde sait lire et écrire ! En Nouvelle-Zélande, où je travaille, on doit être à 50 % d’analphabétisme…
Ces investissements permettent réellement de limiter le taux de criminalité ?
Oui. Concernant le taux d’incarcération, c’est un peu plus subtil, car dans les pays scandinaves, les criminels ne sont pas tous aussitôt envoyés en prison. Pour éviter la surpopulation carcérale, les peines de prison peuvent être repoussées pendant plusieurs mois. Le condamné peut choisir sa date d’entrée en prison, selon ses propres impératifs… Vous imaginez ? En Norvège, le taux d’incarcération a ainsi été maintenu artificiellement bas (73 pour 100 000 habitants, contre 784 aux Etats-Unis) pour ne pas déroger au principe « un homme, une cellule ». Ainsi en 2006, il y avait une liste d’attente de 3 000 personnes qui patientaient tranquillement avant d’aller en prison…
Pourquoi n’en profitent-ils pas pour s’enfuir ?
Parce que le système pénitentiaire ne cherche ni à dégrader ni à avilir : « La prison est une simple privation de liberté », stipule la loi finlandaise. « Les prisonniers doivent être traités dans le respect de la dignité humaine », ajoute la loi suédoise, « ils doivent être traités avec la plus grande compréhension concernant les difficultés particulières liées à la vie en prison. » Le pari est le suivant : plus les conditions carcérales sont favorables, c’est-à-dire proches de la vie « dehors », plus la réintégration des prisonniers fera facile.
Est-ce trop beau pour être vrai ?
On ne doit pas oublier que quel que soit le confort matériel, les prisonniers sont toujours des prisonniers. Il y a des règles, une surveillance, des sanctions et une privation de choix qui les différencient des gens libres. L’« exception pénale scandinave » n’élimine pas la souffrance de l’incarcération mais, d’après tout ce que j’ai vu sur le terrain, elle la diminue grandement.
Propos recueillis par Marion Quillard




lundi 29 octobre 2012

Malgré une progression des aménagements de peines, les cellules sont surpeuplées de personnes en âge de travailler. État des lieux.




99,1: c'est le nombre de personnes détenues pour 100 000 habitants. Il y en avait 93,1 pour 100 000 habitants en 2011. Selon un rapport du Conseil national de l'alimentation publié en décembre 2011, "la diversité démographique carcérale est à l'image de la société française : des personnes âgées de 13 à 85 ans sont incarcérées". Cependant, ajoute le rapport, 18 % sont de nationalité étrangère, représentant 80 nationalités différentes. Et "les deux tiers de la population détenue sont âgés de 21 à 39 ans", l'âge moyen des personnes détenues étant précisément de 34,4 ans (chiffres de l'administration pénitentiaire au 1er janvier 2012). Autre spécificité carcérale : le sexe. Le détenu moyen est un homme, puisque les femmes ne représentent que 3,5 % des personnes détenues, et les mineurs seulement 1 %. Par ailleurs, la durée moyenne sous écrou était de 9,6 mois en 2011. Et 13,3 % des détenus ont passé moins d'un mois en détention.

Densité carcérale à géométrie variable

Au 1er septembre 2012, l'administration pénitentiaire enregistrait 66 126 personnes écrouées détenues pour 57 385 places opérationnelles, réparties sur les 190 établissements pénitentiaires français. Les établissements pour peines pratiquant un numerus clausus, la surpopulation concerne essentiellement les maisons d'arrêt qui accueillent des personnes en détention provisoire (soit 25,1 % du nombre des détenus) et des condamnés dont le reliquat de peine est inférieur à deux ans. Le taux d'occupation est également élevé dans les centres de semi-liberté. "Il est banal de voir trois lits dont deux superposés dans 9,4 mètres carrés", note le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, dans un avis du 23 octobre 2012. Par ailleurs, relève-t-il, "le concept de place est d'une remarquable plasticité. Une maison d'arrêt antillaise comptait ainsi 130 places théoriques mais 244 lits (soit une surcapacité de 188 %) ; une autre dans le centre de l'Hexagone avait 122 places théoriques mais 154 pratiques (soit un taux de surcapacité de 126 %) ; il suffit, pour accroître le théorique, de mettre deux lits superposés dans une cellule individuelle ou trois dans une cellule en comptant deux" (Avis du 22 mai 2012 sur la surpopulation carcérale).

63 000 places de prison en 2017

Une entorse abyssale au principe de l'encellulement individuel selon lequel "chaque détenu doit en principe être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle, sauf lorsqu'il est considéré comme préférable pour lui qu'il cohabite avec d'autres détenus ", comme le prescrit la règle pénitentiaire européenne. Celle-ci fait néanmoins l'objet d'un moratoire jusqu'en 2014 dans les maisons d'arrêt "pour des motifs liés à la distribution intérieure des locaux ou au taux d'occupation" (Circulaire du 14 avril 2011). Seules les personnes détenues ayant subi des violences de la part de codétenus et celles faisant l'objet d'une interdiction de communiquer ordonnée par l'autorité judiciaire afin de préserver le déroulement de l'enquête bénéficient en priorité d'une cellule individuelle. N'importe quel détenu (même prévenu) peut par ailleurs solliciter son transfert en cellule individuelle, sous réserve bien sûr des places disponibles... À cet égard, Christiane Taubira vise 63 000 places de prison d'ici cinq ans. Rendez-vous, donc, en 2017.

Essor du bracelet électronique

Parmi les facteurs expliquant la courte durée de détention, l'augmentation des aménagements de peines (placement sous surveillance électronique, placement à l'extérieur, libération conditionnelle, semi-liberté). Au 1er septembre 2012, 11 549 personnes représentant 19,3 % des personnes écrouées en bénéficiaient, soit une progression de 17,8 % en un an. Parmi elles, 1 813 sont en semi-liberté (soit 3 % des détenus), 8 772 sont sous placement électronique (il y en avait 2 940 au 1er septembre 2008) et 964 en placement à l'extérieur*. "La surveillance électronique est un moyen de réguler les effectifs de personnes détenues, mais dont l'effet restera quantitativement limité, souligne le contrôleur des prisons, Jean-Marie Delarue. L'expérience montre en effet que le bracelet électronique n'est supportable que quelques mois."
* Cette mesure d'aménagement de peine permet à un condamné à une courte peine (moins de 2 ans) de l'exécuter en dehors de la prison, en travaillant, suivant une formation, recherchant un emploi... Chaque jour, une fois l'activité terminée, la personne se rend, selon la décision du juge de l'application des peines, soit dans les locaux d'une association qui l'encadre et l'héberge, soit au domicile d'un proche, soit à l'établissement pénitentiaire. Cette mesure est révoquée si le condamné viole ses obligations.