mercredi 31 octobre 2012

Prison de Fresnes : les petits frères des Pauvres accompagnent les détenus gravement malades et en fin de vie

http://www.senioractu.com/Prison-de-Fresnes-les-petits-freres-des-Pauvres-accompagnent-les-detenus-gravement-malades-et-en-fin-de-vie_a15388.html


Placé sous le parrainage de Robert Badinter, ancien Garde des Sceaux et ancien Président du Conseil Constitutionnel, ce 10ème anniversaire constitue l’occasion de présenter les actions menées par les petits frères des Pauvres auprès des personnes malades détenues au sein de l’Etablissement Public de Santé National de Fresnes.


« LE TAUX DE RÉCIDIVE EST DE 16 % À BASTOY, 66 % AUX ETATS-UNIS »

http://www.6mois.fr/Le-taux-de-recidive-est-de-16-a


Dans un fjord au large d’Oslo, la capitale norvégienne, une petite île a été transformée en centre de détention. Bastoy, première "prison écologiste et humaniste du monde", n’a ni enceintes ni barreaux. Intrigué par la vie de l’île-prison, Espen Eichhöfer raconte le quotidien des détenus.

Le portfolio « L’île aux prisonniers », publié dans le numéro 4, est une plongée dans la prison ouverte norvégienne de Bastoy. John Pratt, professeur de criminologie, décrypte cette exception carcérale


Dans un fjord au large d’Oslo, en Norvège, l’île de Bastoy a été transformée en prison ouverte, sans enceintes ni barreaux. Les 150 détenus vont et viennent sur le ferry qui les relie à la terre ferme, travaillent dans des étables, des poulaillers, des épiceries ou des serres, entourés de gardiens non armés. Professeur de criminologie à Wellington, en Nouvelle-Zélande, John Pratt s’est rendu de nombreuses fois dans les pays scandinaves pour étudier leur système carcéral et le comparer à celui des pays anglophones.

6Mois/ Dans les pays scandinaves, Bastoy est-elle une prison « normale » ?
John Pratt/ Bastoy est le joyau des prisons ouvertes. L’environnement pittoresque, le ferry, les chalets, la « guesthouse »… Tout cela en fait un endroit très photogénique et un exemple particulièrement médiatisé. Mais ce parangon est aussi typique des pays scandinaves, où les prisons ouvertes concernent 20 à 30 % de la population carcérale, un chiffre énorme !
Qu’est-ce qu’une prison ouverte ?
Les barreaux et les murs sont réduits à leur minimum, tout simplement. Le concept de « prison ouverte » a été créé en Finlande, dans les années 1930, quand des détenus ont été autorisés à travailler dans des fermes. Les détenus sont payés selon le salaire en vigueur, paient des impôts, achètent leur nourriture, envoient de l’argent à leur famille ou à leurs victimes et économisent pour leur libération. Cette rémunération a longtemps eu cours en Norvège et en Suède mais aujourd’hui, les détenus n’y reçoivent plus qu’une indemnité, comme dans la plupart des prisons européennes.
Dans certaines prisons ouvertes, les détenus peuvent continuer à exercer leur ancien emploi. Près de Stockholm, il y a même un parking spécial pour les prisonniers, pour qu’ils puissent aller travailler le matin et revenir le soir. S’ils sont en retard, ils peuvent téléphoner et on leur garde un repas au chaud.
Et a contrario, les prisons fermées scandinaves ressemblent-elles aux nôtres ?
À l’extérieur, une prison fermée scandinave ressemble à n’importe quelle prison. Mais on n’y trouve pas d’ « odeur de prison », ce mélange de mauvaise hygiène, de pots de chambre, de nourriture et de fumée de cigarette. La plupart des cellules ont leurs propres toilettes et beaucoup ont une télévision. Les prisonniers peuvent aller et venir mais personne ne semble traîner pour passer le temps. Beaucoup travaillent ou suivent des cours à distance. Il y a aussi des salles communes, avec télé et/ou cuisine. La nourriture m’a semblée généreuse, en tout cas personne n’est rationné en sucre, pain ou que sais-je encore, comme cela peut être le cas dans les prisons du monde anglophones.
Autre illustration de l’incroyable qualité des prisons scandinaves : des solariums sont mis à disposition dans de nombreuses prisons, ouvertes ou fermées. Ce n’est pas si exotique que l’on pourrait l’imaginer car dans ces pays, le manque de lumière en hiver peut causer de sérieuses carences en vitamine D. Mais tout de même ! Cela prouve que les autorités ne s’intéressent pas seulement à gérer les urgences ou les cas graves, mais tentent de prévenir les problèmes de santé chroniques.
La formation du personnel pénitentiaire est-elle spécifique ?
Le ratio est d’environ un membre de l’administration carcérale pour un détenu. En Norvège, tous ont des formations universitaires et bénéficient de deux années de formation payées. Cette formation ressemble à celle qui est fournie aux contrôleurs judiciaires, pour que tous aient les mêmes bases académiques, professionnelles et éthiques. Travailler en prison semble être une option non seulement envisageable, mais beaucoup plus attractive que dans toutes les autres sociétés modernes. Pour preuve : beaucoup d’étudiants scandinaves travaillent l’été en tant que gardiens de prison !
Dans vos recherches, vous parlez d’ « exception pénale scandinave » : qu’est-ce c’est ?
Un cercle vertueux : l’État providence omniprésent garantit un faible taux de criminalité. Les prisons ne sont pas bondées et assurent aux détenus des conditions de vie décentes. Celles-ci font baisser le taux de récidive et donc, en retour, le taux de criminalité. Rendez-vous compte ! Le taux de récidive est de 66 % aux Etats-Unis, 31 % en Finlande, 30% en Suède et 20 % en Norvège. À Bastoy, il est même de 16% !
Depuis quand la criminalité fait-elle l’objet de politiques publiques ?
Dans les années 1930, les pays scandinaves considèrent le crime comme une forme de maladie qui, grâce au diagnostic d’experts et à une politique d’accompagnement, peut être éradiqué comme n’importe quelle autre maladie contagieuse. En Suède, le Code pénal indique même depuis 1945 que les prisonniers sont « des orphelins de la maison du peuple suédois » (styvbarn i det svenska folkhemmet) et que le système se doit de les réintégrer.
Dans les années 1960, le ministère suédois de la justice prédit même avec optimisme qu’il n’y aurait plus que 600 prisonniers à travers le pays d’ici 1980 ! Les détenus ne sont pas considérés comme de dangereux outsiders mais comme un simple groupe de bénéficiaires de l’Etat providence.

Quels sont ses outils pour réduire la criminalité ?
La lutte contre la drogue et l’alcool, le renforcement des services de psychiatrie et une véritable politique de l’emploi sont particulièrement efficaces. En 2006, le parti travailliste norvégien déclarait qu’ « avec des services publics adaptés, le crime et la plupart de ses motivations peuvent être éliminés. »
La politique pénale est menée par des experts, indépendamment de tout opportunisme politicien. Tout le contraire de ce qui se passe dans les pays anglophones, où le comportement des hommes politiques et des médias face aux meurtriers frise l’hystérie : souvenez-vous que pendant les émeutes de Londres, à l’été 2011, des gamins ont été envoyés en prison parce qu’ils avaient volé des bouteilles d’eau !

Est-ce que cela coûte cher ?
Le coût humain et social est bien plus important lorsque le système pénal est inefficace et les prisons bondées ! Il est bien plus rentable d’investir en amont dans l’éducation et la santé. Plus les gens sont éduqués, plus ils sont capables d’avoir un emploi et de gagner de l’argent, moins ils seront sensibles aux sirènes du crime. Une chose m’a frappé dans les prisons norvégiennes : tout le monde sait lire et écrire ! En Nouvelle-Zélande, où je travaille, on doit être à 50 % d’analphabétisme…
Ces investissements permettent réellement de limiter le taux de criminalité ?
Oui. Concernant le taux d’incarcération, c’est un peu plus subtil, car dans les pays scandinaves, les criminels ne sont pas tous aussitôt envoyés en prison. Pour éviter la surpopulation carcérale, les peines de prison peuvent être repoussées pendant plusieurs mois. Le condamné peut choisir sa date d’entrée en prison, selon ses propres impératifs… Vous imaginez ? En Norvège, le taux d’incarcération a ainsi été maintenu artificiellement bas (73 pour 100 000 habitants, contre 784 aux Etats-Unis) pour ne pas déroger au principe « un homme, une cellule ». Ainsi en 2006, il y avait une liste d’attente de 3 000 personnes qui patientaient tranquillement avant d’aller en prison…
Pourquoi n’en profitent-ils pas pour s’enfuir ?
Parce que le système pénitentiaire ne cherche ni à dégrader ni à avilir : « La prison est une simple privation de liberté », stipule la loi finlandaise. « Les prisonniers doivent être traités dans le respect de la dignité humaine », ajoute la loi suédoise, « ils doivent être traités avec la plus grande compréhension concernant les difficultés particulières liées à la vie en prison. » Le pari est le suivant : plus les conditions carcérales sont favorables, c’est-à-dire proches de la vie « dehors », plus la réintégration des prisonniers fera facile.
Est-ce trop beau pour être vrai ?
On ne doit pas oublier que quel que soit le confort matériel, les prisonniers sont toujours des prisonniers. Il y a des règles, une surveillance, des sanctions et une privation de choix qui les différencient des gens libres. L’« exception pénale scandinave » n’élimine pas la souffrance de l’incarcération mais, d’après tout ce que j’ai vu sur le terrain, elle la diminue grandement.
Propos recueillis par Marion Quillard




lundi 29 octobre 2012

Malgré une progression des aménagements de peines, les cellules sont surpeuplées de personnes en âge de travailler. État des lieux.




99,1: c'est le nombre de personnes détenues pour 100 000 habitants. Il y en avait 93,1 pour 100 000 habitants en 2011. Selon un rapport du Conseil national de l'alimentation publié en décembre 2011, "la diversité démographique carcérale est à l'image de la société française : des personnes âgées de 13 à 85 ans sont incarcérées". Cependant, ajoute le rapport, 18 % sont de nationalité étrangère, représentant 80 nationalités différentes. Et "les deux tiers de la population détenue sont âgés de 21 à 39 ans", l'âge moyen des personnes détenues étant précisément de 34,4 ans (chiffres de l'administration pénitentiaire au 1er janvier 2012). Autre spécificité carcérale : le sexe. Le détenu moyen est un homme, puisque les femmes ne représentent que 3,5 % des personnes détenues, et les mineurs seulement 1 %. Par ailleurs, la durée moyenne sous écrou était de 9,6 mois en 2011. Et 13,3 % des détenus ont passé moins d'un mois en détention.

Densité carcérale à géométrie variable

Au 1er septembre 2012, l'administration pénitentiaire enregistrait 66 126 personnes écrouées détenues pour 57 385 places opérationnelles, réparties sur les 190 établissements pénitentiaires français. Les établissements pour peines pratiquant un numerus clausus, la surpopulation concerne essentiellement les maisons d'arrêt qui accueillent des personnes en détention provisoire (soit 25,1 % du nombre des détenus) et des condamnés dont le reliquat de peine est inférieur à deux ans. Le taux d'occupation est également élevé dans les centres de semi-liberté. "Il est banal de voir trois lits dont deux superposés dans 9,4 mètres carrés", note le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, dans un avis du 23 octobre 2012. Par ailleurs, relève-t-il, "le concept de place est d'une remarquable plasticité. Une maison d'arrêt antillaise comptait ainsi 130 places théoriques mais 244 lits (soit une surcapacité de 188 %) ; une autre dans le centre de l'Hexagone avait 122 places théoriques mais 154 pratiques (soit un taux de surcapacité de 126 %) ; il suffit, pour accroître le théorique, de mettre deux lits superposés dans une cellule individuelle ou trois dans une cellule en comptant deux" (Avis du 22 mai 2012 sur la surpopulation carcérale).

63 000 places de prison en 2017

Une entorse abyssale au principe de l'encellulement individuel selon lequel "chaque détenu doit en principe être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle, sauf lorsqu'il est considéré comme préférable pour lui qu'il cohabite avec d'autres détenus ", comme le prescrit la règle pénitentiaire européenne. Celle-ci fait néanmoins l'objet d'un moratoire jusqu'en 2014 dans les maisons d'arrêt "pour des motifs liés à la distribution intérieure des locaux ou au taux d'occupation" (Circulaire du 14 avril 2011). Seules les personnes détenues ayant subi des violences de la part de codétenus et celles faisant l'objet d'une interdiction de communiquer ordonnée par l'autorité judiciaire afin de préserver le déroulement de l'enquête bénéficient en priorité d'une cellule individuelle. N'importe quel détenu (même prévenu) peut par ailleurs solliciter son transfert en cellule individuelle, sous réserve bien sûr des places disponibles... À cet égard, Christiane Taubira vise 63 000 places de prison d'ici cinq ans. Rendez-vous, donc, en 2017.

Essor du bracelet électronique

Parmi les facteurs expliquant la courte durée de détention, l'augmentation des aménagements de peines (placement sous surveillance électronique, placement à l'extérieur, libération conditionnelle, semi-liberté). Au 1er septembre 2012, 11 549 personnes représentant 19,3 % des personnes écrouées en bénéficiaient, soit une progression de 17,8 % en un an. Parmi elles, 1 813 sont en semi-liberté (soit 3 % des détenus), 8 772 sont sous placement électronique (il y en avait 2 940 au 1er septembre 2008) et 964 en placement à l'extérieur*. "La surveillance électronique est un moyen de réguler les effectifs de personnes détenues, mais dont l'effet restera quantitativement limité, souligne le contrôleur des prisons, Jean-Marie Delarue. L'expérience montre en effet que le bracelet électronique n'est supportable que quelques mois."
* Cette mesure d'aménagement de peine permet à un condamné à une courte peine (moins de 2 ans) de l'exécuter en dehors de la prison, en travaillant, suivant une formation, recherchant un emploi... Chaque jour, une fois l'activité terminée, la personne se rend, selon la décision du juge de l'application des peines, soit dans les locaux d'une association qui l'encadre et l'héberge, soit au domicile d'un proche, soit à l'établissement pénitentiaire. Cette mesure est révoquée si le condamné viole ses obligations.

dimanche 28 octobre 2012

mercredi 17 octobre 2012

Flash-ball: le préfet de police de Paris "assigné"devant le tribunal administratif


A.F.P. : Justice-police
 
    PARIS, 17 oct 2012 (AFP) - Un jeune homme, qui affirme avoir été grièvement blessé au visage par un tir d'arme à balles en caoutchouc à Paris en juin 2009, a assigné le préfet de police de Paris devant le tribunal administratif, a annoncé mercredi son avocat à l'AFP.

   Le jeune homme, un étudiant Rouennais, âgé de 25 ans au moment des faits, avait été blessé à la joue et avait eu la mâchoire fracturée alors qu'il participait le 21 juin 2009 à la fête de la musique sur la place de la Bastille. Sa blessure avait entraîné une incapacité temporaire partielle de 45 jours et l'avait contraint à une opération de la mandibule.

Le jeune homme affirme avoir été touché par un tir de "flash-ball" alors que les forces de l'ordre déployées sur la place de la Bastille tentaient de contenir un mouvement de foule.

"Il s'agissait d'une manifestation pacifique", souligne son avocat, Me Etienne Noël, du barreau de Rouen, qui dénonce un "emploi disproportionné et injustifié" des lanceurs de balles souples, et l'absence de sommation préalable.
L'assignation contre le préfet de police de Paris Bernard Boucault a été déposée le 9 octobre.

Me Etienne Noël a déjà obtenu à plusieurs reprises la condamnation de l'Etat et de l'Administration pénitentiaire au nom de la dignité humaine, avec des dommages et intérêts pour les détenus, en réparation de séjours dans des cellules surpeuplées et insalubres.

"C'est la même démarche que celle que j'utilise dans mes actions sur les conditions d'incarcération", a-t-il expliqué à l'AFP pour justifier son action devant le tribunal administratif. "J'attaque l'administration de tutelle de façon à obtenir la mise en cause, non pas d'une personne, mais du système dans son ensemble pour l'aider à se réformer", a-t-il ajouté.

En avril, le tribunal correctionnel de Nantes avait relaxé un policier accusé d'avoir éborgné un lycéen avec une balle en caoutchouc lors d'une manifestation en 2007 à Nantes, en soulignant que le policier avait "exécuté un ordre" et que sa responsabilité pénale ne pouvait être engagée.
 

Ub article de blog à propos du recours contre les flashball; la voie administrative fait son chemin !

http://www.27novembre2007.blogspot.fr/2012/10/clement-rouen-contre-le-ministere-de.html

mardi 16 octobre 2012

Journée de Formation organisée par l’E.N.M. à Aix en Provence le 5 octobre 2012.



Le point de vue de l’Avocat dans la « problématique » du contrôle des établissements pénitentiaires.

Cette journée, organisée par l’E.N.M. et la Cour d’Appel de MONTPELLIER aurait dû se dérouler en  2011 mais le très faible nombre d’inscrits tant du côté magistrat que du côté des Avocats (encore plus faible !) a entraîné son annulation ; fort heureusement, cette passionnante journée a pu être organisée, et maintenue, pour l’année 2012 et s’est déroulée le 5 octobre, à Aix en Provence.

Ce préliminaire n’est pas vain ; en effet, l’annulation, en 2011, reflète le peu d’intérêt des avocats, y compris pénalistes, pour la prison et les problématiques qui s’y rattachent, savoir, d’une part, le droit de l’application des peines et, d’autre part, le doit administratif pénitentiaire.

Je rêve d’avocats qui, combinant ces différents champs, pratiqueront ce que j’appelle la « défense pénale globale », allant de la garde à vue à la sortie de prison ; le droit pénal classique, certes, mais aussi les libérations conditionnelles ab initio ou non, le suivi de l’exécution des peines, la personne détenue face à l’administration pénitentiaire, le contentieux de la responsabilité de l’Etat dans les hypothèses de suicide en prison, d’atteintes hétéro agressives, comme on dit pudiquement pour parler des viols, des meurtres en prison etc…

Depuis plus de quinze années que je traîne mes guêtres en prison, je mesure l’immensité des champs d’action qui s’offrent aux Avocats et le rôle central qu’ils pourraient jouer en ces lieux dans lesquels ils sont les seuls à pouvoir pénétrer facilement pour rencontrer leurs clients, usagers d’un service public, le service public pénitentiaire.

Je mesure aussi l’importance de la demande d’aide et d’assistance qui émane des personnes détenues, demande non satisfaite.

S’agissant du contrôle des établissements pénitentiaires, l’Avocat a un rôle central à jouer.

J’ai pris l’habitude d’évoquer une idée, celle de renverser le panoptique, c’est-à-dire, utilisant l’invention de Monsieur Bentham, créant un modèle d’architecture permettant, à partir d’un point central, d’observer l’ensemble des cellules d’une prison, d’imaginer que ce sont maintenant les personnes détenues elles-mêmes qui surveillent l’administration pénitentiaire, qui la contrôlent !

Ce contrôle est exercé au premier chef par le Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté mais pas seulement ; en effet, antérieurement à la création du Défenseur des Droits, la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité, difficile à saisir, certes, exerçait un contrôle donnant lieu à des avis allant parfois jusqu’à des propositions de sanctions disciplinaires.

Tant le CGLPL que le Défenseur des Droits, dorénavant, sont faciles à saisir par toute personne qui a connaissance, soit d’une atteinte commise dans un lieu de privation de liberté.

Les relations, qui pourraient être riches et fructueuses, entre l’Avocat et les institutions de contrôle

L’Avocat dénonce :

S’agissant de la prison, les rapports et avis des deux institutions sont une véritable mine d’or pour l’avocat qui veut s’en emparer.

Qu’on se le dise, le dernier rapport du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté fait état de ce que seulement 3,5% de ses saisines sont le fait d’Avocats ! (l’année précédente, ils étaient 7% !)

Pour ma part, j’ai déjà saisi le Contrôleur Général de plusieurs situations choquantes, révoltantes ; de même, par l’intermédiaire d’un parlementaire, j’ai pu saisir l’ancienne Commission de Nationale de Déontologie de la Sécurité.

Premier exemple : Expertise de la maison d’arrêt de Troyes, au mois d’avril 2011, saisine, le soir même, du Contrôleur Général à propos de véritables cages dans lesquelles sont enfermées, entassées, parquées, les personnes détenues en attente de parloir.

Résultat : après une visite inopinée du Contrôleur à Troyes, les cages, qui se trouvaient au nombre de trois, destinées à « réguler les flux », un peu partout dans la maison d’arrêt, ont été démontées !

Deuxième exemple : les rapports du Contrôleur Général recèlent des possibilités de recours ; par exemple, s’agissant des salaires versés aux personnes détenues, malgré le Décret du 23 décembre 2010, ceux-ci sont toujours inférieurs au barème édicté par ce texte.

L’avis du Contrôleur est particulièrement utile pour fonder un recours auprès du Garde des Sceaux, dans un premier temps devant le Tribunal Administratif, le cas échéant, dans un second temps, aux fins de rappels de salaires à partir du 1er janvier 2011.

Par ailleurs, s’agissant des conditions de détention en Nouvelle Calédonie, le rapport de Monsieur DELARUE, très alarmant, a d’ores et déjà servi de base à une série de recours contre l’Etat, couronnés de succès, sans qu’il ait été besoin de recourir à une expertise !

Troisième exemple : Centre Pénitentiaire de Liancourt (Oise), une altercation oppose une personne détenue à des surveillants ; ces derniers maîtrisent la première qui est blessée à cette occasion.

Après un bref passage à l’hôpital, la personne détenue est placée en prévention au quartier disciplinaire où elle se suicidera le lendemain, vers 14 heures, non sans avoir demandé de l’aide toute la matinée et entamé une grève de la faim en protestation.

La CNDS, saisie par une parlementaire, a effectué un travail énorme d’enquête, d’auditions, tant des surveillants concernés par l’altercation que des détenus témoins pour aboutir à la démonstration que riposte des surveillants avait été disproportionnée à l’énervement finalement relatif de la victime.

L’avis qui s’en suivit, très critique vis-à-vis de l’administration pénitentiaire, me fut très utile pour obtenir la condamnation de l’Etat devant la Cour Administrative d’Appel de DOUAI.

Je me souviens également avoir saisi la C.N.D.S. d’une situation particulièrement choquante, toujours à LIANCOURT (vieux CD) où onze personnes détenues avaient fait l’objet d’un fouille collective à nu dans une vaste salle de douche !


L’Avocat défend :

Protection et progression des Droits des personnes détenues :

Droit à l’image : l’affaire du film « Le Déménagement » annulation de l’interdiction par l’administration pénitentiaire, au motif non justifié de l’article 41 de la loi pénitentiaire du 29 novembre 2009, de diffusion du film retraçant l’histoire du déménagement de la vieille maison d’arrêt de Rennes vers le nouveau centre pénitentiaire de Rennes-Vezin, dans lequel les détenus, avec leur accord écrit, apparaissent non floutés.

Recul de la notion de mesure d’ordre intérieur : régression de l’emprise de l’administration pénitentiaire en matière disciplinaire, transferts, mise à l’isolement, régimes différenciés etc…

Le Droit à la dignité : expertises des établissements pénitentiaires, s’agissant des conditions de détention entraînant une multiplication des condamnations de l’Etat à raison des conditions de détention dans de nombreux établissements pénitentiaires, métropole et outre-mer :

·         Rouen
·         Nantes
·         Clermont Ferrand
·         Paris La Santé
·         Fresnes
·         Tours
·         Marseille les Baumettes
·         Remire Montjoly (Guyane)
·         Camp Est en Nouvelle Calédonie

Le concept du contrôle par les personnes détenues elles-mêmes gagne du terrain ; d’une personne en 2008, à Rouen et quatre personnes à Nantes, la même année, elles sont maintenant des centaines à oser saisir le Juge administratif aux fins de condamnation de l’Etat.

Ces procédures se sont d’ailleurs accélérées depuis la mise en œuvre, pour la première fois, en 2009, à Rouen et généralisée depuis, de procédures de référés provision, partant du principe que la demande ne peut être sérieusement contestable tant l’atteinte à la dignité est avérée.

Par ailleurs, les constats et expertises des établissements pénitentiaires présentent également l’avantage de pouvoir être utilisés dans des procédures judiciaires, telles que les suspensions de peine pour raison médicale.

En effet, quoi de mieux qu’une expertise (en l’occurrence, celle de la maison d’arrêt de Fresnes) pour démontrer à un juge de l’application des peines l’incompatibilité de l’état de santé d’une personne détenue avec les conditions de détention auxquelles elle est soumise ?