vendredi 28 novembre 2014

25 Novembre 2014 0 heure; fin du moratoire instauré par l'article 100 de la Loi Pénitentiaire du 24 novembre 2009 !


Une "fenêtre de tir" vient de s'ouvrir, à partir du 25 novembre 2014 qui permettra, d'une part, de déposer des recours administratifs portant sur la violation par l'Administration Pénitentiaire, de la règle de l'encellulement individuel,  et, d'autre part, de soulever, devant les Juges des Libertés et de la détention et les Tribunaux Correctionnels, à l'occasion des débats contradictoires au sein des procédures de comparution immédiate, l'illégalité d'un mandat de dépôt dans une maison d'arrêt (en réalité, TOUTES les maisons d'arrêt !) dans un contexte d'encellulement collectif.

http://www.dalloz-actualite.fr/interview/prison-recours-contre-l-encellulement-collectif-se-preparent

mardi 30 septembre 2014

Revue de presse: AFP - La réforme pénale entre en vigueur sur fond d'inquiétude au sujet des moyens‏ mis en oeuvre

La réforme pénale controversée de Christiane Taubira entre en grande partie en vigueur mercredi, 1er octobre mais des voix dans le monde judiciaire s'inquiètent de l'absence de moyens et d'une certaine précipitation. 
Sur 56 dispositions de la "loi relative à la prévention de la récidive et à l'individualisation des peines", seules cinq ne seront pas appliquées le 1er octobre, selon la Chancellerie.
Il s'agit notamment de deux mesures destinées à éviter les "sorties sèches"de prison, c'est-à-dire sans aucune mesure d'accompagnement et qui représentent aujourd'hui 80% des sorties: l'examen automatique de la situation du condamné aux deux tiers de la peine et la libération sous contrainte,réservée aux peines inférieures ou égales à cinq ans d'emprisonnement.
Deux autre mesures sont différées: la transaction pénale, qui doit permettre à un officier de police judiciaire de fixer des obligations qui mettront fin aux poursuites. Les discussions se poursuivent avec le ministère de l'Intérieur sur son application, alors que le syndicat majoritaire chez les officiers de police en demande le report. La suppression de l'automaticité de la révocation du sursis simple nécessite quant à elle une adaptation du système informatique.
Deux mesures phares du texte s'appliqueront par contre, la nouvelle peine de "contrainte pénale", inspirée des dispositifs de probation, et la suppression des peines plancher.
Mais de nombreuses voix s'inquiètent d'un manque de moyens et critiquent une impréparation, alors que les circulaires détaillant les modalités d'application n'ont été envoyées que vendredi par la Chancellerie.
- "Usine à gaz" -
"Il n'y a aucune précision pratique, c'est une usine à gaz," déplore Christophe Régnard, le président de l'Union syndicale des magistrats (USM), largement majoritaire dans la profession, qui pourtant n'est pas opposée au fond du texte.
"La réalité c'est qu'au 1er octobre on nous demande de mettre en oeuvre cette réforme à moyens constants", dénonce-t-il.
"Une impréparation totale", renchérit Céline Parisot de l'USM, qui dénonce notamment la multiplication des réunions de suivi imposée aux services de probation et juges d'application des peines dans des délais impossibles à tenir, selon le syndicat. "On se demande si ces gens-là sont déjà allés en juridiction, ça n'est tout simplement pas envisageable", affirme-t-elle.
Le ministère met lui en avant les efforts de recrutement, le gouvernement ayant promis la création d'un millier de postes dans les services de probation jusqu'en 2016.
Mais les premiers - un peu moins de 400 -, en formation, seront "opérationnels dans deux ans seulement," souligne Jean-François Forget, le secrétaire général de l'UFAP-Unsa, premier syndicat pénitentiaire, lui non plus pas opposé au fond des nouvelles mesures.
Evoquant aussi une "usine à gaz", il estime que le projet crée "une surcharge de travail et s'assoit sur les difficultés actuelles" des services de probation, dont les conseillers gèrent en moyenne une centaine de dossiers chacun.
Quant à l'application de la nouvelle peine, il sent les magistrats "sceptiques" devant un processus "assez fastidieux". Christophe Régnard fait écho, craignant "très fort que la mesure ne soit pas prononcée", jugée trop complexe à mettre en oeuvre.
"Ça n'est pas si compliqué que cela", tempère Dominique Raimbourg, député PS et rapporteur de la loi à l'Assemblée. Défendant un "premier pas vers une simplification de notre chaîne pénale", il juge "mesuré" l'effort représenté par le maximum de 20.000 contraintes pénales annuelles pronostiqué par l'étude d'impact gouvernementale, sur plus de 600.000 condamnations chaque année pour délits. Et s'il reconnaît un effort "réel mais pas suffisant" sur les postes, il plaide aussi pour que certains délits, notamment routiers, soient contraventionnalisés pour réduire l'engorgement des tribunaux. 
Pour Alexandre Giuglaris, délégué général de l'Institut pour la justice (IPJ), le gouvernement impose au contraire à la hâte un projet auquel s'est opposée cette association classée à droite. "La prochaine fois qu'il y aura un fait divers terrible, on dira que c'est la faute de la justice, alors qu'il
s'agira d'une question de moyens".

1er octobre 2014 : entrée en vigueur de la réforme pénale

samedi 19 juillet 2014

Avant tout...Avocat...! Lettre ouverte à Madame TAUBIRA



Ministère de la Justice
Madame Christiane TAUBIRA
Garde des Sceaux
1, place Vendôme
75001 PARIS



Cluny, le 18 juillet 2014


            Madame La Garde des Sceaux, chère Madame,

Au terme d’un long débat intérieur, j’ai pris la décision de vous présenter ma démission de mes fonctions au sein du Conseil National de l’Exécution des Peines.

Cette décision n’a pas été facile à prendre, loin de là.

En effet, jusqu’ à présent, je n’avais que des raisons d’être en concordance avec votre action et vos objectifs

Tout d’abord, à titre personnel, quelle n’a pas été ma joie lorsque j’ai reçu un appel téléphonique de votre Conseiller Pénitentiaire, me demandant si j’acceptais de participer à ce Conseil que vous souhaitiez créer, comprenant des personnalités prestigieuses, sachant que j’étais le seul Avocat siégeant à ce titre, mon confrère DE KERKHOVE, intervenant en qualité de Présidente de l’INAVEM.

J’étais heureux de bénéficier de la possibilité de m’investir à un autre niveau, de porter mes quelques idées avec l’espoir qu’elles soient  entendues…

Déjà, dans le cadre de la Commission Interministérielle Santé-Justice, créée à votre initiative et à celle de Madame le Ministre de la Santé et des Affaires Sociales, j’ai eu la possibilité de porter quelques idées en matière d’aménagements de peine pour raison médicale dont certaines ont été retenues par la Commission et figurent dans le rapport qui vous a été remis.


Ensuite, le 13 février 2014, je n’oublierai sans doute jamais le moment  où je vous ai vue, vous, Madame la Garde des Sceaux, monter à la tribune du Sénat pour soutenir ma proposition de Loi portant création d’une procédure de suspension de détention provisoire pour raison médicale, soumise au vote des sénateurs et adoptée à l’unanimité ce jour-là !

Pour terminer, cette même proposition de Loi, transmise à l’Assemblée Nationale, sauf erreur de ma part, a fait l’objet d’un amendement, intégré dans la réforme pénale a été adopté par les députés.

Nonobstant l’absence complète des longues peines dans la réforme pénale, au motif que cette Loi ne concerne que les courtes peines alors que certaines modifications auraient permis de « fluidifier » considérablement le flux des aménagements de peine pour les premières, (assouplissement de l’article 730-2 du CPP, s’agissant des libérations conditionnelles pour raison médicale, admission du placement extérieur au rang des conditions probatoires prévues par ce même article, réforme du dernier alinéa de l’article 729 du CPP, permettant ainsi aux personnes âgées de plus de 70 ans purgeant une peine de sûreté de bénéficier des  mêmes possibilités d’aménagements de peine que les autres, ce, conformément au souhait du législateur qui entendait que toutes les personnes âgées de plus de 70 ans puissent demander une libération conditionnelle sans condition de délai dès lors que leur prise en charge était organisée et qu’aucun risque grave de récidive n’était à craindre), je n’avais donc aucune raison d’éprouver un quelconque état d’âme.

Or, malgré tout, il demeure que je suis avant tout Avocat.

Et, en tant qu’Avocat, je ne puis qu’être profondément ému du sort qui nous est fait actuellement.

Tout d’abord, l’Aide Juridictionnelle et le combat que ma profession a mené et mènera encore afin que tous puissent accéder à une réelle défense dans des conditions dignes pour tous.

J’ai eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet dans le livre dont je vous ai remis un exemplaire, lors de la deuxième réunion du CNEP et dont j’ai la faiblesse de penser que vous l’avez lu.

Dans ce livre, j’ai tenté de témoigner de l’extrême fragilité de nombre de cabinets d’Avocats, écrasés par les charges, pour certains (en grand nombre) rémunérés (plutôt indemnisés) essentiellement au titre de l’aide juridictionnelle et, donc, travaillant le plus souvent à perte.

J’ai témoigné de l’indigence de l’indemnisation de certaines missions, comme, par exemple, dans le cadre de l’application des peines.

Cet exemple est topique de l’hypocrisie qui consiste, d’un côté à prétendre que l’Avocat participe à l’élaboration du projet d’aménagement de peine » (circulaire d’application de la Loi du 15 juin 2000) ce qui signifie qu’il doit (devrait) s’investir très en amont dans le processus de l’application des peines et, d’un autre côté lui dénier les moyens financiers en ne l’indemnisant qu’à hauteur de 4 unités de valeur, soit moins de 100 € !

En outre, et de façon récurrente, reste à régler la question du montant même de l’Unité de Valeur…
Ayant participé à la manifestation nationale du 7 juillet dernier, au milieu de milliers de mes confrères, à Paris, j’ai ressenti ce sentiment d’unité qui nous relie tous quelle que soit notre ancienneté, Avocats de base comme moi-même, Bâtonniers, tous unis par un même serment dont vous connaissez parfaitement les termes.

Or, à peine rentrés dans nos cabinets, nous avons entendu Monsieur Montebourg s’exprimer pour fustiger certaines professions du Droit, dites réglementées, accusées par lui de « capter » la fortune des français !

Selon lui, ces professions, dont les Avocats, seraient en situation de monopole et en profiteraient pour s’enrichir sur le dos de nos compatriotes !
Comme vous le savez parfaitement, la profession d’Avocat ne bénéficie en aucune façon d’une situation de monopole ! L’accès  à la profession ne fait l’objet d’aucun numerus clausus et, d’ailleurs, personne n’a jamais songé sérieusement à en instaurer un.

Nul besoin d’un Décret pour créer un cabinet d’Avocat.

Nos honoraires ne sont pas soumis à un tarif et la concurrence est bien réelle…

Nos clients, d'ailleurs, le savent très bien qui, très fréquemment, changent d'Avocat comme de chemise et n'hésitent souvent pas à consulter l'un d'entre nous pour contrôler le travail de leur propre conseil!

Qui, ne serait-ce qu’une seconde, songerait à critiquer les médecins et à les accuser de profiter d’une situation de monopole ?

Comme le médecin soigne, l’Avocat, après une formation longue et pointue, dans le strict respect de son serment, « Je jure, comme Avocat, d’exercer mes fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité », conseille, favorise, grâce à ses compétences, l’accès au juge. Il exerce les Droits de la Défense, principe à valeur constitutionnelle, le tout dans des conditions économiques le plus souvent précaires….

Et l’on ose parler de captation ?

Lorsque je me rends une journée entière dans un établissement pénitentiaire, où que ce soit en France, pour rencontrer des clients détenus, je n’ai pas le sentiment de capter leur richesse !

Lorsque mes confrères, partout en France, interviennent quotidiennement dans le cadre de permanences pénales, le plus souvent au titre de l’aide juridictionnelle, je ne pense pas qu’il soit possible de les soupçonner de vouloir s’enrichir et de peser sur le patrimoine des Français !

Compte tenu de ce débat toujours d’actualité, tant qu’une solution pérenne et acceptable par tous n’aura pas été dégagée, à propos de l’aide juridictionnelle, le fait de nous accuser de capter les revenus des français relève de la plus flagrante injustice, voire d’une opération de pure démagogie !

De très nombreux confrères se sont élevés contre ces accusations, manifestement infondées et d’autant plus injustes qu’elles proviennent de quelqu'un qui a été un de nos confrères !

Personnellement, j’ai été atterré par ces propos, réitérés le lendemain sur une radio publique et, paraît-il, étayés par un rapport émanant du ministère des finances dont personne, parmi les principaux intéressés, n’a eu connaissance !

Mais, finalement, ce qui m’a le plus choqué, c’est, sauf erreur de ma part,  l’absence totale de soutien de la part de la Chancellerie !

Vous êtes, après tout, notre Ministre !

Qu’avons-nous entendu, provenant de la Place Vendôme ?

Là encore, sauf erreur de ma part, rien !

C'en est trop!

Voilà ici, résumées, les raisons pour lesquelles je vous présente ma démission.

Je ne sais si ce courrier que j’ai rédigé sous la forme d’une lettre ouverte, vous sera remis ;  je l’espère sincèrement afin que vous puissiez prendre connaissance du témoignage qu’il contient, celui d’un Avocat ordinaire, dépendant pour une part non négligeable de l’aide juridictionnelle et révolté par les accusations dont fait l’objet sa profession qui procède de plus en plus du sacerdoce.

Oserais-je espérer une réponse ?

Dans cette attente, malgré tout,

Je vous prie d’agréer, Madame la Garde des Sceaux, l’expression de mes sentiments respectueux.



                                                           Etienne NOËL

vendredi 18 juillet 2014

Une question en Or !!!

Question en or de mon fils (le plus jeune : 9 ans), passant devant l'Etude du Notaire de Cluny (Saône et Loire).

"Dis, papa, c'est quoi, un office notarial?

Tu vois, mon chéri, c'est le bureau d'un Notaire où il y a plusieurs Notaires, c'est une profession réglementée,  tout le monde ne peut pas s'installer comme Notaire, c'est l'Etat qui décide du nombre d'offices notariaux.

Les Notaires "captent" le patrimoine des français, en prélevant, dès qu'ils rédigent un acte, moult taxes, Droits d'enregistrement, impôts sur les plus values etc...pour les reverser à l'Etat; (donc, finalement, c'est bel et bien l'Etat, à travers les Notaires, qui capte le patrimoine des français), enfin, leurs honoraires sont soumis à un tarif.

Ce n'est pas comme des Avocats alors ?

Et bien non, pas du tout, nous,nous pouvons nous installer où nous voulons, nos honoraires sont libres et notre rôle n'est pas celui d'un collecteur d'impôts !

Merci Papa..."

jeudi 26 juin 2014

Et l'article D 147-12 ? Il est fait pour les chiens ?

Aujourd'hui, une jeune femme est venue me voir, catastrophée, car son compagnon venait de reçevoir un avis d'incarcération lui enjoignant de se présenter à la maison d'arrêt de R....le 11 juillet.

En même temps, elle me remet une ordonnance rendue par un juge de l'application des peines il y a plusieurs mois, constatant " que tout aménagement de peine sans incarcération préalable est impossible".

Le compagnon de ma cliente avait été condamné à plusieurs peines, savoir :

4 mois fermes en récidive légale, cette condamnation entraînant de plein droit la révocation d'un sursis antérieur de 2 mois.

4 ans dont deux avec sursis assorti d'une mise à l'épreuve, en récidive légale, 13 mois ayant été d'ores et déjà effectués sous le régime de la détention provisoire.

Total : 30 mois fermes - 12,5 mois en détention provisoire = reste 17,5 mois qui auraient du ( auraient pu ?) être aménagés avant toute incarcération sur le fondement de l'article 723-15 du CPP.

Or, le JAP a considéré, par une ordonnance devenue définitive, à considéré que cela était impossible puisque le condamné devait purger 17,5 mois !

L'était ce réellement ?

Oh que non !

En effet, ce que le Juge de l'APplication des Peines à, semble t'il, totalement oublié c'est qu'il existe un article D 147-12 du Code de Procédure Pénale ainsi rédigé :

" si le condamné à déjà été écroué en détention provisoire, le JAP ....examine la situation de l'intéressé au regard du crédit de réduction de peine dont il bénéficie pour l'intégralité de la peine et des éventuelles réductions de peine supplémentaires susceptibles de lui être octroyées sur la partie de la condamnation subie en détention provisoire"

En application de cette disposition, les calculs auraient du être les suivants :

Crédits de remise de peine:

Sur les 4 mois : 5 jours x 4 = 20 jours
Sur les 2 mois : 7 x 2 = 14 jours
Sur les deux ans en récidive : 3 mois

Total des CRP : 4 mois et 4 jours.

Peine nette à purger : 17 mois et 15 jours - 4 mois et 4 jours = 13 mois et 11 jours.

Au dessus du seuil me direz vous ?

Oui, mais c'est compter sans la possibilité offerte au JAP de lui accorder également des remises de peine supplémentaires pouvant aller jusqu'à deux mois, s'agissant de la condamnation à deux années pour laquelle 12,5 mois ont été purgés sous le régime de la détention provisoire.

Or, il semblerait que celle-ci se soit déroulée sans incident, mon client ayant de plus entamé un suivi psychologique, demandé à travailler etc...

Je ne sais si le JAP a pensé ou non à faire usage de cet article, ce que je constate ( et reproche) c'est de ne même pas l'avoir visé dans la décision, même pour dire qu'il n'entendait pas l'utiliser

Cette ordonnance incomplète envoie une personne qui travaille en détention sans manifestement avoir tout exploré !!!

Il est tout à fait possible qu'au vu du rapport de l'administration pénitentiaire prévu par le texte le JAP  ait accordé des remises de peine supplémentaires qui auraient fait descendre la peine à purger au dessous du seuil de 12 mois !

Faute d'un tel raisonnement, mon ( nouveau) client à devoir être incarcéré très prochainement en maison d'arrêt où il attendra que le JAP, saisi d'une requête, statue sur une requête après écrou, soit dans plusieurs mois!

D'où le titre de cet article !



mercredi 21 mai 2014

Pré ouverture du centre pénitentiaire d'Orléans SARAN

http://www.larep.fr/accueil/brightcove/2013/03/06/visite-du-futur-centre-penitentiaire-d-orleans-saran_92207397782001.html

Jeudi 22 mai, j'aurai la chance d'intervenir à la demande des juges de l'application des peines d'Orléans, dans le cadre d'une formation à destination de mes confrères d'Orléans dispensée au sein du nouveau centre pénitentiaire de Saran.

A cette formation participeront tous les intervenants au processus de l'application des peines : SPIP, Parquet, JAP, bien sûr, Administration Pénitentiaire et.... le Barreau!

De l'intérêt de se connaître, de travailler ensemble.

L'ouverture d'un établissement pour peine comme celui de Saran, jouxtant un quartier maison d'arrêt destiné à remplacer la vétusté maison d'arrêt d'Orléans, suscite des problématiques liées aux longues peines, c'est l'objet de mon intervention :

Élaboration d'un projet de sortie
Procédure d'examen de dangerosité
Relèvement de sûreté et/ ou libération conditionnelle
Procédure de suspension de peine pour raison médicale
Mesures de sûreté : surveillance judiciaire, surveillance de sûreté, placement sous surveillance électronique mobile, rétention de sûreté, injonction de soins
Etc....

Ce sera un bonheur d'intervenir dans ce contexte.... même si je sais d'avançe que le CPOS suscitera les mêmes critiques que tous les autres établissements de ce type,  tous construits sur le même plan, totalement déshumanisés, gérés par le privé, construits dans le cadre d'un PPP, ruineux pour l'Etat.

Je joins une vidéo d'une visite du CPOS sous la férule de Monsieur Voituron, le premier directeur de cet ensemble qui "accueillera" environ 750 personnes détenues.

L'après midi sera plus consacré au Droit Pénitentiaire Administratif, au Droit disciplinaire.

Je voudrais faire partager à mes confrères ma conception du rôle de l'avocat Pénaliste qui se projette bien au-delà du procès pénal en envisageant, lorsqu'il rencontre son client, tous les aspects de sa situation: exécution de la peine, mesures d'aménagement de peine, procédures administratives diverses tendant à accroître ses droits, à obtenir un complément de rémunération ... Etc...

Commentaires demain soir ! 

mardi 29 avril 2014

Petit article du jour !!

Aujourd'hui : comparution immédiate à Rouen :
A la fois le plus drôle et le plus triste
Un pov´ gars totalement désinséré, dormant dans les cages d'escaliers, à brisé la vitre d'une voiture pour voler un I Pod.
Les flics rédigent un dernier PV avant transmission au Procureur : "saisissons le caillou ayant servi à briser la vitre ( photo du caillou jointe) et le confions pour destruction à une entreprise conventionnée " si si !! véridique !! Des bagnards peut être ?  
Le plus triste a été aussi de voir des juges persuadés qu'en composant le 115 on était sûr de trouver un hébergement d'urgence et qu'il fallait être bien paresseux pour ne pas trouver un toit pour la nuit !!
Il faut être acteur de votre réinsertion mon bon monsieur ! Pour la peine .... 5 mois de taule ! Comme ça vous allez pouvoir préparer quelque chose avec le SPIP pour votre sortie ! Bien sûr !! 

Quand je vous disais qu'un tel aveuglement c'était à pleurer !! 

vendredi 28 février 2014

IL FAUT SUPPRIMER LE PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ELECTRONIQUE MOBILE !!



Ci-dessous la retranscription de la motivation d'un arrêt rendu par la chambre de l'application des peines de Paris le jeudi 27 février 2014, confirmant un jugement rendu par le tribunal de l'application de Paris qui avait ordonné la levée du placement sous surveillance électronique mobile (PSEM) qui avait été ordonné, dans le cadre d'une mesure de surveillance judiciaire, par le tribunal de l'application des peines de Versailles.

Comme cela avait été plaidé par votre serviteur, la mesure de PSEM, présentée officiellement comme facilitant la réinsertion, tout en constituant un dispositif « cadrant », constitue, en réalité, un outil de désinsertion, du fait, d'une part, de la surveillance constante qu'il implique, de la stigmatisation vis-à-vis d'autrui du fait de l'apparence visible du dispositif et, d'autre part, en raison des problèmes techniques multiples et constants qu'il rencontre.

La cour a ainsi motivé sa décision :

« S'il est manifeste que la réinsertion a condamné qui a exécuté une importante période de détention est un processus long, délicat et fragile, il convient que l'encadrement mis en place, certes dans un but de prévention de la récidive, n'ait pas un effet inverse à celui recherché…

Toutefois, le PSEM a montré qu'il pouvait avoir un impact négatif sur l'insertion professionnelle du condamné, comme sur la construction d'un étayage familial et social sécurisant, ces deux éléments constituants des points d'ancrage essentiels de nature à aider le condamné dans son évolution et par là, a réduire encore sa dangerosité ainsi que l'ont noté les différents experts et plus récemment le médecin coordonnateur en charge du contrôle du suivi de l'injonction de soins.

Les problèmes techniques de paramétrage auxquels il n'a pu être remédié, font que des alarmes intempestives se déclenchent plusieurs dizaines de fois par jour sans qu'il y ait violation des horaires et lieux d'assignation dès que le condamné se retrouve dans un bâtiment ou en limite de zone. Ainsi que la cour a pu elle-même constater, le déclenchement de l'alarme s'est produit à l'occasion de la comparution de Monsieur X à l'audience.

Dès lors, il ne peut être sérieusement contesté que le déclenchement de cette alarme,  notamment à l'occasion des entretiens d'embauche qu'il a pu obtenir, ne pouvait que faire obstacle à ce que le condamné puisse les réussir et obtenir un emploi stable et que le relatif échec de ses recherches d'emploi ne résulte pas uniquement du profil et de l'âge du condamné.

Plus encore, l'équipe éducative du foyer, confirmant en cela les propos de Monsieur X, a souligné que ces mêmes difficultés techniques tendent à confiner le condamné dans sa chambre du foyer sans lui permettre de tisser de véritables relations sociales au sein de la structure et de s'intégrer à la vie collective du foyer, celui-ci ne pouvant se rendre dans les salles communes sans que l'alarme ne se déclenche.

De la même façon, le PSEM l'empêche de tisser des liens plus étroits avec sa famille proche qui vit en banlieue parisienne, rendant plus difficiles les rencontres avec celle-ci.

Ainsi, Monsieur X, qui a démontré sa réelle volonté de s'intégrer et de faire sa vie loin de ses anciennes fréquentations et des lieux où il a commis les faits pour lesquels il a été condamné, se voit limité dans ses efforts et isolé socialement par le PSEM.

Or, le dispositif mobile tel qu'il est envisagé dans le cas de Monsieur X n'apporte pas de véritable valeur ajoutée à la surveillance judiciaire mise en place en ce qu'il permet simplement de vérifier le respect des horaires d'assignation au foyer mais lui laisse sur la journée une grande marge de manœuvre s'il reste sur … et dès lors qu'il n'est pas apparu nécessaire de l'interdire de fréquenter ou de s'approcher de lieux particuliers susceptibles de favoriser la récidive.

Certes, le contrôle permanent de la localisation du condamné par le biais du PSEM constitue une réelle garantie contre le risque de récidive mais cet effet positif est contrebalancé par le fait, qu'en l'espèce, il l’empêche de réussir sa réinsertion socio-professionnelle qui, à moyen terme, constitue le gage le plus efficace de prévention de la récidive »

Ainsi donc, par cette décision, la Chambre de l'Application des Peines près la Cour d'Appel de Paris, confirmant le tribunal de l'application des peines de cette ville, prend acte de l'impact particulièrement négatif du dispositif de surveillance électronique mobile sur la réinsertion des personnes qui y sont soumises en ce qu'il entrave considérablement, à la fois les relations avec autrui mais également la réinsertion socioprofessionnelle proprement dite.

Cette situation n'est pas la première que j'ai eue à connaître et, dans une autre procédure, la chambre de l'application des peines de Paris a également ordonné la levée d'un placement sous surveillance électronique mobile en motivant sa décision sur le fait qu'il s'agissait d'un véritable « carcan », totalement contraire aux objectifs de prévention de la récidive dont il est affirmé que celle-ci passe de façon quasi exclusive par la réinsertion socio-professionnelle.

Il est donc, dès lors, particulièrement regrettable que ce dispositif, issu de la loi du 12 décembre 2005, et intégré à l'ensemble du dispositif des mesures de sûreté par la loi du 25 février 2008, intégré dans le code de procédure pénale sous les articles 706-53-13 et suivants, ne figure pas dans le projet de réforme pénale de Madame le Garde des Sceaux.





jeudi 23 janvier 2014

Les prisons françaises sont-elles en surchauffe ?




De nombreux incidents ont secoué le monde carcéral ces dernières semaines. Deux visions, l'une sécuritaire, l'autre plus participative, s'opposent pour faire face aux problèmes.
Agressions envers des surveillants, prises d’otages, refus de réintégrer les cellules… La litanie des incidents dans les prisons françaises s’égraine, semaine après semaine, de Toul à Montmédy, en passant par Condé-sur-Sarthe. Cette tension apparemment grandissante se traduit-elle dans les chiffres de l’administration pénitentiaire ? Difficile de savoir, tant l’institution demeure floue sur la situation. Des chiffres internes, dont l’Observatoire international des prisons (OIP) a eu connaissance, apportent toutefois quelques éléments de réponse.
Ainsi, les huit premiers mois de 2013 ont été marqués par une augmentation sensible (+40%) des mouvements collectifs en détention par rapport à la même période en 2012. Les violences entre détenus et les agressions envers le personnel, elles, diminuent (-2,6% et -5,3%). Sollicitée par Libération, l’administration n’a pas été en mesure d’indiquer si cette tendance se poursuivait depuis. Si tel était le cas, cela relativiserait la thèse d’une surchauffe carcérale. Certes, les détenus se mobilisent, notamment en refusant de réintégrer leurs cellules, mais les violences s’atténueraient.
La diversité des prisons françaises complique la donne. Quoi de commun, en effet, entre la maison centrale d’Alençon-Condé-sur-Sarthe, qui regroupe les «pires détenus de France», et le centre de détention de Montmédy, où les prisonniers ont profité de leur relative liberté de mouvement pour tourner un Harlem Shake ? Néanmoins, les différentes parties prenantes du dossier en conviennent : la situation carcérale n’est pas reluisante, même s’ils se méfient des «emballements médiatiques» récents. Zoom sur trois points clés du débat.

La vie en prison

La surpopulation carcérale endémique est un élément clé du débat, et ce depuis plusieurs années. Au 1er décembre 2013, on comptait 67 738 prisonniers pour 57 447 places disponibles, soit un taux d’occupation de 117,91%. Tous les soirs, plus de 1 000 matelas sont déployés à même le sol pour qu’un détenu y passe la nuit. A la maison d’arrêt de Sequedin, dans le Nord, «il y a trois détenus par cellule, décrit Anne Chereul, représentante locale de l’OIP. C’est un quotidien fait de promiscuité et de frustrations, avec un exercice difficile des droits fondamentaux, par exemple pour maintenir les liens familiaux. Cela peut entraîner des réactions éruptives.» Les locaux parfois insalubres, comme aux Baumettes, n’améliorent pas les choses.

La sécurisation, une réponse insuffisante ?

Pour limiter les risques d’incidents, la piste sécuritaire semble aujourd’hui privilégiée. Christiane Taubira, la ministre de la Justice, a ainsi dévoilé un «plan de sécurisation» après la spectaculaire tentative d’évasion de Rédoine Faid. «Cela ne répond pas réellement aux besoins de sécurité, estime Antoine Danel, secrétaire national du syndicat des directeurs pénitentiaires (SNDP). La surenchère technologique, à travers des portiques de sécurité, des caméras, des miradors, n’est pas toujours adaptée. Il ne faut pas oublier que des hommes doivent porter ces enjeux.»
Le débat en devient même parfois caricatural, lorsque certains syndicats de surveillants dénoncent à longueur de communiqués le «laxisme» dont bénéficieraient les détenus et réclament, bruyamment, plus de «sécurité». Même point de crispation autour des fouilles intégrales, qui, selon la loi, doivent être l’exception et non la règle. Cela n’empêche pas FO Pénitentiaire de demander aujourd’hui leur retour.

Une piste, la sécurité dynamique ?

«L’administration fabrique des gens dangereux en imposant des régimes de détention très sévères, affirme Anne Chereul. C’est un cercle vicieux.» Elle cite l’exemple d’un détenu qui s’est apaisé depuis que ses conditions de détention ont été améliorées. «Le rapprochement de chez lui, le vouvoiement des gardiens ont été bénéfiques», dit-elle. L’OIP demande que l’administration applique les recommandations du Conseil de l’Europe sur le concept de «sécurité dynamique». «Les miradors, barbelés et autres caméras de surveillance ne suffisent pas. Il faut un régime plus participatif afin d’obtenir de l’ordre, juge Anne Chereul. L’idée, c’est de permettre aux détenus de vivre dans des conditions les plus proches possible de l’extérieur, via des activités professionnelles ou socio-culturelles, des relations avec la famille. Bref, il faut leur offrir des perspectives de développement personnel.»
La «sécurité dynamique» prône également un dialogue plus important. «Il faut permettre aux conflits de s’exprimer autrement que par la violence. On peut imaginer des comités de détenus, un système de représentation, qui feraient remonter des revendications à l’administration», ajoute Anne Chereul, qui recommande également une meilleure formation des surveillants à la «gestion du conflit»«Certains ont des approches très sécuritaires, ce qui ne fait qu’aggraver les tensions.»
Ce syndrome du surveillant «porte-clés», se contentant d’ouvrir et fermer les portes, Thierry Cordelette le connaît très bien. Le responsable de l’Ufap-Unsa au centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand (71) l’a longtemps expérimenté. Mais depuis septembre, un nouveau système a été mis en place, baptisé «surveillant-référent».«Chaque surveillant suit le parcours de vingt détenus de manière personnalisée, explique-t-il. Cela change la relation entre les deux parties, qui peuvent échanger lors d’entretiens réguliers et travailler ensemble à des pistes de comportement à adopter pour préparer l’après-prison.» Selon le syndicaliste, la situation s’est largement apaisée depuis cette réforme. «Il n’y a quasiment plus d’incidents, alors qu’avant on en avait un par semaine.»
Sylvain MOUILLARD

Le nombre des personnes détenues en France : toujours une tendance haussière sur une année !

PARIS, 21 jan 2014 (AFP) - Quelque 67.075 personnes étaient incarcérées en France au 1er janvier, un chiffre en baisse (-1%) par rapport à décembre mais en hausse sur un an (+0,8%), selon un communiqué publié mardi la direction par l'Administration pénitentiaire.
Toujours au 1er janvier, la capacité opérationnelle des établissements
pénitentiaires, c'est-à-dire le nombre de places disponibles, était de 57.516 places.
La taux d'occupation, soit le nombre de détenus rapporté au nombre de
places, était donc de 116,6%, en baisse par rapport à décembre (117,9%).
Parmi les personnes incarcérées, 16.622 étaient des prévenus et 50.533 des condamnés.
Outre les personnes incarcérées, 12.378 autres bénéficiaient d'un
aménagement de peine: 1.022 sous forme de placement à l'extérieur, 1.765 en semi-liberté et 9.591 équipées d'un bracelet électronique.
Les aménagements de peine sont en hausse de 5,6% sur un an et de 15,8% sur deux ans.

Détenus hors de leurs gonds à la prison d’Alençon




A la prison d'Alençon-Condé-sur-Sarthe, après une prise d'otage le 30 décembre. 

Une quinzaine d’incidents majeurs, selon les syndicats, ont eu lieu en six mois dans ce centre pénitentiaire ultrasécurisé inauguré en avril.
Elle était présentée comme la prison «la plus sécurisée de France». Avec sa double enceinte de béton, ses miradors et ses caméras, le centre pénitentiaire d’Alençon-Condé-sur-Sarthe, dans l’Orne, devait accueillir les détenus les «plus durs» du pays. «Ceux dont on ne veut pas ailleurs», comme le résume Philippe Devique, secrétaire régional de l’Ufap-Unsa, le principal syndicat de surveillants pénitentiaires. Mais depuis son ouverture il y a huit mois, le lieu collectionne prises d’otages, agressions et incidents violents. Il est devenu l’incarnation d’une certaine vision carcérale, hypersécuritaire, dont le modèle semble aujourd’hui à bout de souffle. Chose rare, l’administration pénitentiaire reconnaît à demi-mots avoir fait fausse route.
Condé-sur-Sarthe, «c’est la lie de la population carcérale», raconte Alexis Grandhaie, élu de la CGT pénitentiaire dans le Grand-Ouest «On n’a eu de cesse d’alerter contre ce projet né il y a dix ans, qui associe des longues peines - donc des gens qui n’ont rien à perdre -, avec des profils psychologiques. Bref, les cas les plus complexes.» Les syndicats ont recensé une quinzaine d’incidents majeurs au cours des six derniers mois. L’hiver a été particulièrement tendu.
Le 10 janvier, le directeur adjoint de la maison centrale est blessé à la tête par un détenu armé d’un pic aiguisé. Fin décembre, un surveillant est retenu en otage quelques heures par deux prisonniers demandant leurs transfèrements dans un autre établissement. Un chantage plutôt efficace : les intéressés ont depuis été affectés à Rennes et Rouen, non sans avoir écopé de huit ans de prison supplémentaires. Peu importe, ils n’ont pas grand-chose à perdre.
C’est ce qui ressort des témoignages reçus par l’Observatoire international des prisons (OIP). «C’est une centrale extrêmement sécuritaire qui fait péter les plombs, car on nous traite comme dans les prisons américaines, explique un détenu. C’est vraiment inhumain. Moi, si je ne suis pas transféré rapidement, je vais faire une prise d’otage pour parler aux médias de notre détention très difficile […]. S’il vous plaît, aidez-nous.» Un autre appuie : «La direction nous pousse à commettre des actes car Condé-sur-Sarthe est un QHS amélioré [quartier de haute sécurité, un système supprimé en 1981, ndlr]. On est tout le temps en cellule, on n’a pas beaucoup d’activité. C’est pour ça qu’il y a des mouvements et la prise d’otage. Moi, je suis déterminé à ne pas me laisser faire. Car pour le système de Condé, on est des cobayes. Si je dois prendre des années pour être transféré ou pour faire respecter mes conditions de détention, je le ferai sans hésiter.»
Désœuvrement. Outre sa population particulièrement difficile, la prison de Condé cumule plusieurs handicaps. «Le travail préalable à l’ouverture, notamment la mise en place d’un comité de pilotage, n’a pas été correctement réalisé. Tout s’est fait à marche forcée», déplore Philippe Devique. L’encadrement est insuffisant. Sur les 180 surveillants, la moitié sont stagiaires. Des jeunes, qui n’ont pas l’expérience requise. L’établissement n’a même pas de psychiatre à plein-temps.
Autre problème : la configuration des lieux. «Ce type de prison demande d’importants effectifs pour les postes de sécurité, miradors, portes d’entrée, postes de surveillance de la promenade, décrit Philippe Devique. Résultat : les agents ne sont pas tous au contact de la population pénale. Et ceux qui le sont se retrouvent isolés.» Et Alexis Grandhaie d’appuyer : «Or, on ne peut pas travailler sans lien humain.»
L’isolement géographique n’arrange pas les choses. Les détenus, qui viennent de partout en France, se retrouvent très loin de leurs familles. Le désœuvrement pèse aussi sur le quotidien. Même si, pointe Jean-Michel Dejenne, responsable du SNDP, seconde organisation chez les directeurs de prisons, Condé-sur-Sarthe est plutôt«dans une bonne moyenne» en terme d’activité professionnelle : «Sur les 67 détenus, 41 travaillent.»
Confrontée à ce constat d’échec, l’administration pénitentiaire (AP) commence à bouger. Aucune nouvelle affectation de détenus ne sera effectuée tant que la situation ne sera pas «stabilisée». Le profil des prisonniers devrait changer. «Condé continuera à accueillir des détenus difficiles car c’est aussi la vocation de cet établissement, mais on va affecter des gens qui ont des profils plus diversifiés», a indiqué vendredi dernier Bruno Clément, sous-directeur de l’état-major de sécurité de l’AP. L’homme a aussi reconnu que le pari de la «sécurité maximum» n’était pas suffisant : «Au-delà des équipements, il faut qu’on travaille beaucoup plus sur la relation entre les personnels et ces détenus.» Les surveillants devraient être formés en conséquence, et les prisonniers bénéficier d’un suivi «individualisé». Un revirement qui devrait ravir l’OIP. L’association milite de longue date pour une plus grande implication des personnels pénitentiaires. Ce concept, baptisé «sécurité dynamique», prône un régime carcéral plus participatif, et pas uniquement basé sur la dissuasion.
Parole.L’OIP relativise par ailleurs l’impression de surchauffe carcérale qu’ont donnée de multiples incidents - à Condé-sur-Sarthe, mais aussi à Toul, ou encore aux Beaumettes à Marseille. Ainsi, les onze premiers mois de 2013 ont été marqués par une diminution de 6,1% des agressions contre le personnel. En revanche, les mouvements collectifs, comme les refus de réintégrer les cellules, par exemple, explosent (+ 33,67%). Pour Anne Chereul, représentante de l’OIP dans le Nord-Pas-de-Calais, cela illustre la nécessité de sortir d’une vision uniquement sécuritaire : «Il faut donner des possibilités d’expression aux détenus à travers des groupes de parole par exemple. Et permettre aux conflits de s’exprimer autrement que par la violence.»
Par SYLVAIN MOUILLARD (Libération)