STRASBOURG (Conseil de l'Europe), 23 fév 2012 (AFP) - La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné jeudi la France pour avoir emprisonné un détenu souffrant de graves troubles mentaux au lieu de le faire interner en établissement spécialisé, une mesure manifestement inadaptée pour traiter le malade. Le requérant, actuellement interné dans un centre hospitalier à Marseille, est atteint d'une psychose chronique de type schizophrénique. Sa maladie génère des troubles hallucinatoires, des délires ainsi que des conduites agressives et addictives. En août 2005, alors qu'il était détenu dans un centre pénitentiaire, un incendie s'était déclaré dans la cellule et son co-détenu était décédé quatre mois plus tard des suites de ses blessures. Mis en examen pour destruction dun bien par incendie ayant entraîné la mort, il avait été jugé apte à comparaître par une expertise psychiatrique. En novembre 2008, le requérant avait été condamné à 10 ans de prison par la cour d'assises du Var et incarcéré à Marseille. Mais en appel, la cour d'assises des Bouches-du-Rhône avait déclaré le requérant irresponsable pénalement et ordonné son hospitalisation d'office. Entre 2005 et 2009, le détenu avait fait plusieurs séjours dans des établissements spécialisés pour apaiser ses crises. Dans son arrêt, non définitif, la CEDH estime "qu'il était vain d'alterner les séjours à l'hôpital psychiatrique, trop brefs et aléatoires et les séjours en prison, incompréhensibles et angoissants, d'autant plus que le requérant était dangereux pour lui-même et pour les autres". La cour de Strasbourg note aussi que l'"extrême vulnérabilité" du malade "appelait des mesures aptes à ne pas aggraver son état mental, ce que les nombreux allers-retours entre la détention ordinaire et les hospitalisations n'ont précisément pas permis". Elle a condamné la France à verser 10.000 euros pour dommage moral au requérant.