jeudi 23 août 2012

Récidive criminelle : François Hollande va-t-il durcir le ton ?





Alors que Christiane Taubira est taxée de "laxisme", le président de la République veut suivre "les individus les plus dangereux".



En matière de récidive, François Hollande est-il sur la même longueur d'onde que sa ministre de la Justice ? Le dossier n'est pas encore ouvert par la garde des Sceaux que déjà le président de la République promettait mardi à Pierrefeu-du-Var un "dispositif de suivi et de contrôle des individus les plus dangereux". Pourtant, certaines mesures prises par le précédent gouvernement et visant à empêcher la récidive ont été critiquées par Christiane Taubira à plusieurs reprises. Devant la commission des Lois en juillet, la ministre avait manifesté son souhait de mettre fin aux peines-plancher qui, selon elle, ne résolvent rien et "saturent nos prisons". De même, la ministre de la Justice s'était opposée aux rétentions de sûreté dans un entretien au quotidien Libération
Guillaume Larrivé, député UMP de l'Yonne, dénonce sur le site de son parti ce qu'il considère comme des incohérences : "Le discours présidentiel sur la lutte contre la récidive est totalement contredit dans les faits par les choix de politique pénale d'ores et déjà mis en oeuvre par la ministre de la Justice." Jacques Mézard, sénateur (PRG) du Cantal et coauteur, fin juillet, de deux propositions de loi visant à supprimer la rétention de sûreté et les peines-plancher, ne décèle, lui, "aucune incompatibilité" entre le président et sa ministre : "La justice doit avoir les moyens nécessaires pour que les gens aient un véritable suivi judiciaire. Mais on n'est pas obligé de passer par la rétention de sûreté", remarque-t-il.

"Un fait divers, une loi"

"L'accumulation des lois sécuritaires n'est pas un remède à l'insécurité", martèle Jacques Mézard. Et pourtant. Nelly Cremel, Marie-Christine Hodeau, Laëtitia... Ces victimes ont bouleversé l'opinion publique pendant des mois, chacune de ces affaires donnant lieu à une nouvelle loi contre la récidive. En décembre 2005, le placement sous surveillance électronique mobile fait son apparition. À la fin de sa peine, un criminel est ainsi obligé de porter un bracelet électronique qui lui interdit de se rendre dans certains endroits. Avant 2005, le bracelet électronique était utilisé comme aménagement de peine et ne servait qu'à s'assurer de la présence de la personne à son domicile.
En 2007, la loi Dati institue les peines-plancher, une peine minimale prononcée quasi automatiquement en cas de récidive. En février 2008, c'est la rétention de sûreté qui entre dans l'arsenal des juges. Fortement décriée, elle n'est cependant pas encore appliquée. Elle consiste à renfermer un individu à l'issue de sa peine de prison initiale. Le juge argue de troubles de la personnalité ou de sa dangerosité présumée pour l'envoyer dans un centre spécialisé. Le criminel, qui a déjà purgé une peine, en écope donc d'une seconde. Selon les spécialistes, aucune réinsertion n'est envisageable.
À la suite des agissements du "violeur des campings", François Hollande pourrait être tenté de suivre la même ligne que son prédécesseur, Nicolas Sarkozy. Céline Parisot, juge d'application des peines (JAP) à Albertville et secrétaire nationale de l'Union syndicale des magistrats (USM), est fortement opposée à la frénésie législative. "François Hollande est resté assez évasif, nous ne savons pas quelles mesures il compte prendre. Quoi qu'il en soit, nous disposons déjà d'un important arsenal. On ne peut pas surveiller des gens à vie", s'exclame-t-elle.

Changement de méthode ?

Tout comme Christiane Taubira, François Hollande s'était déjà prononcé lors de sa campagne contre les peines-plancher très décriées par de nombreux juristes, au nom du principe - bafoué - de l'individualisation des peines. "Je n'ai pas l'impression d'être un juge laxiste. Pourtant, je remarque qu'un certain nombre de délinquants se retrouvent avec des peines inadaptées par rapport à leur personnalité ou au méfait qu'ils ont commis", témoigne Céline Parisot.
La suppression de la rétention de sûreté pose plus de problèmes. Christiane Taubira a déjà averti qu'elle voulait la supprimer. François Hollande, lui, ne s'est pas encore prononcé.André Vallini, sénateur PS, avait avancé un début de réponse au milieu de la campagne présidentielle. Dans un entretien au Monde.fr, il déclarait : "Il faudrait substituer [à la rétention de sûreté] le renforcement du suivi socio-judiciaire et de la surveillance judiciaire." C'est peut-être à cela que François Hollande pensait lorsqu'il évoquait mardi ces personnes "qui ont achevé leur peine, mais qui doivent encore être surveillées compte tenu de leur caractère dangereux"... La réponse nous sera peut-être apportée à la fin du mois d'août dans une circulaire d'action publique, en cours d'élaboration au ministère de la Justice.
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