vendredi 3 février 2012

Les vieux prisonniers : un enjeu éthique... et financier



Washington, le jeudi 2 février 2012 – Le vieillissement de la population dans les pays occidentaux n’est pas un phénomène qui s’arrête aux portes des pénitenciers. Dans les prisons aussi, les cheveux blanchissent et les rhumatismes s’installent. Plusieurs facteurs favorisent ce phénomène démographique : les très longues peines infligées dans certains pays et une propension à la délinquance qui serait aujourd’hui plus importante qu’auparavant chez les aïeux.

Faites sortir les vieux

Les prisons sont-elles bien préparées à faire face à ce vieillissement de leurs détenus ? La réponse est non selon l’organisation Human Rights Watch dans un rapport consacré aux prisons américaines et publié la semaine dernière. Dans un pays où un condamné sur dix écope de la prison à vie et où 11 % des plus de 51 ans sont soumis à des peines de plus trente ans (!), le vieillissement des prisonniers se pose de façon prégnante. L’étude s’ouvre d’ailleurs sur plusieurs chiffres édifiants : entre 2007 et 2010, le nombre de prisonniers de plus de 65 ans a augmenté de 63 % dans les pénitenciers des Etats-Unis.
Désormais 26 200 personnes incarcérées ont plus de 65 ans et 155 000 dépassent les 55 ans. Face à ces pensionnaires, les services de santé en prison se révéleraient souvent incapables de répondre à des demandes croissantes et quelque peu différentes de leurs missions traditionnelles. Par ailleurs, rares sont les locaux adaptés aux difficultés de locomotion des condamnés âgés et/ou infirmes. Face à ces différents écueils, Human Right Watch s’interroge sur l’opportunité d’accorder un régime de peine différents aux prisonniers les plus âgés et les plus infirmes, qui ne paraissent plus présenter de danger pour la société.

Des prisonniers trop bien soignés

Une question éthique à laquelle pourraient sérieusement réfléchir certaines autorités judiciaires en raison du coût engendré par ce vieillissement de la population carcérale. Human Right Watch relève ainsi qu’alors que les dépenses de santé par prisonnier varient généralement dans le Michigan autour de 5 800 dollars par an, elles dépassent les 11 000 dollars pour ceux âgés de 55 à 59 ans et 40 000 dollars pour ceux ayant dépassé les 80 ans, sans compter les frais surnuméraires en cas d’hospitalisation. Les Etats-Unis ne sont d’ailleurs pas le seul pays à découvrir avec un certain effarement les coûts engendrés par la prise en charge sanitaire de leurs vieux prisonniers. Un récent rapport publié au Canada a révélé que les coûts engendrés par les soins médicaux délivrés aux détenus dans les pénitenciers fédéraux ont progressé de 63 % au cours des six dernières années !

Illustration : Leroy Nash, mort en prison à l'âge de 94 ans en attendant son exécution après avoir passé la plus grande partie de sa vie d'adulte en prison